mercredi 1er janvier
Le Zaïre devient membre de l’Organisation mondiale du Commerce et de l’Organisation mondiale du travail.
mardi 7 janvier
Selon le journal français Le Monde, l'armée régulière zaïroise utiliserait plusieurs anciens militaires français pour recruter deux à trois cents mercenaires européens, sud-africains, angolais et mozambicains, en vue de reprendre les territoires pris par les rebelles dans l'est du pays. Le quotidien évoque notamment un ancien responsable du groupe de sécurité de la Présidence de la République française (entre 1981 et 1995) et un ancien gendarme qui aurait été un proche de la cellule antiterroriste de la présidence français. Le ministère français de la Défense a démenti « toute implication de la France dans ce type d'affaire ».
mercredi 8 janvier
Le gouvernement zaïrois a refusé aux agences de l'ONU l'autorisation de procéder au rapatriement de plus de 180 000 réfugiés vers le Rwanda, au motif que cette opération gênerait les mouvements des troupes gouvernementales qui ont reçu l'ordre de reprendre l'est du Zaïre aux rebelles tutsis.
jeudi 9 janvier
Le président Mobutu est de retour en France.
mardi 14 janvier
Selon Médecins sans frontières, la situation est « catastrophique » dans les camps de réfugiés rwandais de Tingi Tingi et d'Amissi, près de Lubutu, dans l'est du Zaïre. Cent mille personnes y connaissent des conditions de vie épouvantables et il y a plus de vingt décès par jour, surtout des enfants. D'après MSF, ces camps sont sous la coupe des anciennes autorités rwandaises et de leurs milices.
du mercredi 15 au jeudi 16 janvier
Les combats entre les rebelles zaïrois et les forces zaïroises qui tentent de reprendre le Kivu ont fait soixante morts dans la région de Lubutu (nord-ouest de Goma). Le numéro deux des rebelles, le commandant Ngandu Kisase, a été blessé lors d'une embuscade. Des offensives de l'armée zaïroise se déroulent aussi à l'ouest de Bukavu.
lundi 20 janvier
Le Premier ministre zaïrois a donné l'ordre, dans la soirée, aux forces armées zaïroises de « conduire la guerre » pour reconquérir le Kivu envahi en octobre par les banyamulenge (Tutsis originaires du Rwanda). 500 000 réfugiés hutus et déplacés zaïrois errent toujours dans la région.
mardi 21 janvier
Quatorze militaires zaïrois, parmi lesquels quatre officiers, ont été condamnés à mort pour « lâcheté » à Kisangani. Il s'agit de gendarmes qui avaient fui devant les rebelles banyamulenge, le 13 janvier, alors qu'ils étaient censés défendre une position à l'ouest de Goma. Ils doivent être rejugés demain en appel.
L'ambassadeur du Zaïre en France, Ramazani Baya, qui avait tué deux enfants au volant de sa voiture en novembre dernier, a démissionné ses fonctions. Une décision acceptée par le président Mobutu. Baya pourra désormais être jugé en France.
mercredi 22 janvier
Une centaine de militaires zaïrois, blessés lors d'affrontements avec les rebelles, ont été accueillies à l'hôpital de Kisangani (capitale du Haut-Zaïre) depuis deux semaines. Tous ces militaires, généralement touchés par des éclats de mortier, se sont affrontés avec les rebelles de part et d'autre de la rivière Rosso sur la route de Walikale, à quatre-vingt kilomètres de Lubutu. Selon des témoignages, une trentaine de militaires zaïrois auraient péri.
Le diplomate algérien Mohamed Sahnoun a été nommé représentant spécial de l'ONU et l'Organisation de l'unité africaine (OUA) pour la région des Grands Lacs d'Afrique (Zaïre, Rwanda, Burundi, Ouganda, Tanzanie et Kenya).
jeudi 23 janvier
Les violents combats qui se déroulent dans le nord Kivu ont fait, selon un communiqué du ministère zaïrois de la Défense, plus de cent tués « chez l'ennemi », parmi lesquels « un grand chef rebelle ». Le communiqué affirme en outre que « l'ennemi est puissamment renforcé par des troupes régulières des pays qui l'appuient ». Le ministère de la Défense zaïrois a aussi annoncé la reprise de la ville de Walikalé, après deux jours de combats. Selon d'autres sources, l'armée zaïroise bénéficie du soutien de quelque 280 mercenaires étrangers, dirigés par le Belge Christian Tavernier. La France a aussitôt condamné une telle présence, soulignant son strict respect de l'embargo européen sur les armes à destination du Zaïre.
du samedi 25 au dimanche 26 janvier
Plusieurs camions portant des plaques d'immatriculation ougandaises et chargés de soldats sont entrés dans l'est du Zaïre, à hauteur de Rutshuru (soixante kilomètres au nord de Goma).
dimanche 26 janvier
Le gouvernement zaïrois a rejeté « toute idée de dialogue avec les rebelles », et réaffirmé sa « détermination » à récupérer les territoires qu'ils occupent dans l'est du pays. Le gouvernement a de nouveau accusé le Rwanda et l'Ouganda d'être « aux cotés des rebelles qui utilisent les enfants comme boucliers humains ». Des centaines de milliers de réfugiés sont abandonnés à eux-mêmes au milieu des affrontements.
mardi 28 janvier
Bien qu'elle semble marquer le pas, la contre-offensive de l'armée zaïroise dans l'est du Zaïre et la présence dans la région de 280 mercenaires blancs (français et belges, mais aussi russes, « serbes et croates ») dotés d'hélicoptères de combat a jeté sur les routes des milliers de Zaïrois. Ils fuient vers l'ouest et les camps de secours surpeuplés de Tingi Tingi, d'Amisa et de Shabunda (200 000 réfugiés à eux trois). Le choléra y tue une dizaine d'enfants par jour. L'armée zaïroise s'est arrêtée à une centaine de kilomètres à l'ouest de Walikalé, où passe la ligne de front. Elle attend des munitions. De son côté, dans une interview au Soir de Bruxelles, le mercenaire belge Christian Tavernier, assure que ses 280 hommes n'ont « pas encore tiré un seul coup de fusil ». Mais il invite le Rwanda à quitter la Zaïre s'il veut épargner une attaque « en profondeur ».
mercredi 29 janvier
La Belgique a dénoncé la présence de milliers de troupes rwandaises sur le territoire zaïrois. Un responsable rwandais a démenti catégoriquement ces informations.
jeudi 30 janvier
Les autorités zaïroises ont appelé la communauté internationale à « agir face à l'agression prouvée » des troupes étrangères. La rébellion zaïroises reconnait avoir « des relations très amicales » avec l'Ouganda et le Rwanda, tout en affirmant ne recevoir aucune aide militaire de ces pays.
vendredi 31 janvier
Pour gêner la contre-offensive zaïroise, les rebelles qui tiennent la région du Kivu ont ouvert plusieurs fronts. Selon leur chef, Laurent-Désiré Kabila, 8 000 hommes se battraient sur ces différents fronts. Les combats ont obligé les organisations humanitaires à suspendre leurs activités et les avions humanitaires venant d'Ouganda ne peuvent plus atterrir à Kisangani.
lundi 3 février
Le port de Kalémie sur le lac Tanganyika est « tombé » aux mains des rebelles. Leur chef, Laurent Désiré Kabila a lancé un ultimatum aux autorités zaïroises, leur donnant jusqu'au 21 février pour « commencer les négociations ». Par ailleurs, le président Mobutu a entamé une visite de trois jours à Rabat au cours duquel il s'entretiendra avec le roi Hassan II du Maroc. Ils passeront en revue « les problèmes du Zaïre et évoqueront les différents moyens de les résoudre ».
mardi 4 février
Loin de reprendre pied au Kivu, l'armée zaïroise est aux abois face aux rebelles qui ont conquis Kalémie et s'enfonce dans la province du Shaba, aussi riche que turbulente. L'armée de Mobutu vient de lancer une vaste opération de recrutement et a obtenu l'aide du Maroc. Elle affirme être confrontée à des armées très organisées, sous-entendu le Rwanda, le Burundi et l'Ouganda. La situation des 400 000 réfugiés s'aggravent : ils meurent au rythme de plus de 200 par semaine. Les Etats-Unis ont confirmé la présence de troupes étrangères sur le territoire zaïrois.
mercredi 5 février
Le chef de la Rébellion Kabila a affirmé que ses troupes progressaient sur tous les fronts dans l'est du Zaïre. Kinshasa continue à rejeter tout dialogue avec le dirigeant rebelle, le qualifiant de « traitre ». Les 40 000 réfugiés rwandais de Shabunda ont fui leur camp devant l'avance des rebelles. Selon des témoignages disponibles en juin 1997, un terrible massacre aurait eu lieu à quelques kilomètres au nord de Shabunda : des centaines de femmes et d'enfants ont péri, jetés par leurs maris ou leurs pères du haut d'un pont surplombant la rivière Ulundi. Apparemment, ces hommes auraient préféré ce geste de désespoir plutôt que de voir les leurs tomber aux mains des soldats rwandais.
jeudi 6 février
La France a déclaré partager la position des Etats-Unis qui ont averti l'Ouganda, le Rwanda et le Burundi de ne pas intervenir dans l'est du Zaïre. Les rebelles poursuivent leur avancée : ils se sont emparés de Punia (ville importante à 300 kilomètres au sud de Kisangani) et de Shabunda. Kabila a fait parader dans les rues de Goma 5 000 jeunes recrues.
vendredi 7 février
Kinshasa a annoncé que la localité de Watsa, proche de la frontière de l'Ouganda, avait été reconquise il y a huit jours et que 800 rebelles y ont été tués. Shabunda aurait aussi été reprise. Il reste que l'offensive rebelle continue et qu'elle a beaucoup progressé ces trois derniers jours, provoquant un immense mouvement de panique dans les camps de réfugiés. D'autant plus grand qu'ils abritent surtout des Hutus rwandais et burundais, toutes gens avec lesquels Kabila a des comptes à régler. Sadko Okada, le Haut commissaire des Nations unies aux réfugiés estime que ces Hutus étaient encore plus de 560 000 au Zaïre. Confrontées sur le terrain à une tension croissante et parfois menacées de mort, les organisations humanitaires internationales (PAM, MSF, ACF,...) ont décidé de rappeler à Kisangani, où la situation n'est pas sûre, tout leur personnel en mission à Tingi-Tingi.
dimanche 9 février
Laurent-Désiré Kabila a promis à Mme Sadako Ogata, Haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés de ne pas attaquer le camp de réfugiés de Tingi-Tingi où s'entassent près de 160 000 personnes. Son objectif, c'est Kisangani (ex-Stanleyville), au nord-est du camp de réfugiés.
jeudi 13 février
La rébellion a annoncé qu'elle avait pris le contrôle d'une nouvelle ville, Faradje, dans l'extrême nord-est du pays, à la frontière soudanaise. Si le fait est confirmé, cette prise serait cruciale, dans la mesure où elle permet de contrôler la région que traversent les Hutus rwandais pour regagner les camps d'entrainement au Soudan.
samedi 15 février
Le chef des rebelles zaïrois, L.D. Kabila a averti la communauté internationale qu'il attaquerait « dans les trois jours » le camp de réfugiés de Tingi-Tingi (130 000 personnes), si l'on n'en faisait pas sortir les anciens combattants hutus qui y ont trouvé refuge et qui se prépareraient à combattre aux côtés de l'armée zaïroise.
lundi 17 février
Trois avions des forces armées zaïroises ont bombardé pour la première fois la ville de Bukavu, contrôlée par les rebelles Banyamulenge. Le marché a été particulièrement touché. Un premier bilan fait état de six morts et trente-sept blessés. Un responsable de la rébellion estime que c'était Kabila qui était visé. L'aviation zaïroise a aussi bombardé les localités de Walikale et Shabunda (huit morts et des dizaines de blessés sur le marché).
mardi 18 février
L'aviation zaïroise a repris ses bombardements contre trois villes de l'est du pays : Bukavu, Shabunda et Walikale. A Bukavu, l'intervention des avions zaïrois, de petits chasseurs-bombardiers Marchetti-Aermacchi, pilotés par des mercenaires serbes, assure-t-on de source informée à Kisangani, a semé la panique dans la population qui cherche à quitter la ville. Et la colère de Kabila : le chef des rebelles a menacé de répliquer à ces « actions terroristes » en allant attaquer la base aérienne de Kisangani. D'autre part, l'armée zaïroise avance vers l'est. Elle affirme avoir repris les positions perdues il y a dix jours, notamment Bafwasende. L'inconnue, c'est la situation au nord. La garnison d'Isiro est tombée la semaine dernière et l'état-major craint que les rebelles tutsis n'en profitent pour contourner Kisangani et marcher sur Gbadolite, à l'ouest, où se trouve la résidence du président Mobutu, quand il est au Zaïre. Signe de la gravité de la situation : pour la première fois depuis des années, les soldats zaïrois ont été payés normalement. Chaque soldat a reçu 100 FF ; les gradés davantage. Ces derniers développements ne vont sans doute pas faciliter la tâche des médiateurs internationaux (Kenya, Afrique du Sud, Tanzanie, Cameroun, Congo et Zimbabwe). Ils sont arrivés dans la soirée à Kinshasa, ainsi que le secrétaire général de l'OUA, Mohamed Sahnoun. Ils voudraient convaincre le gouvernement zaïrois d'accepter qu'ils rencontrent les rebelles à Nairobi. Le président Mobutu exige d'abord l'évacuation du Kivu par les rebelles. Dans la soirée, le Conseil de sécurité de l'ONU a voté un plan de paix en cinq points préparé par Sahnoun. Peu après, le président sud-africain Nelson Mandela a annoncé la rencontre le 20 février en Afrique du Sud du chef des rebelles Kabila et d'un représentant de Kinshasa.
jeudi 20 février
Le Zaïre a décliné l'invitation à un sommet proposée par des Etats africains. Le gouvernement zaïrois exige au préalable le retrait des forces étrangères qu'il accuse d'avoir envahi son territoire. Selon le ministère des Affaires étrangères sud-africain, des représentants du gouvernement zaïrois (Honoré Ngbanda) et de la rébellion ont entamé séparément, au Cap (Afrique du Sud), des discussions avec des responsables sud-africain et américain pour préparer un éventuel face-à-face zaïro-zaïrois.
samedi 22 février
Les rebelles tutsis se sont emparés de Kalima, dans le calme, sans avoir eu à affronter l'armée, une fois de plus invisible. Le camp des 25 000 réfugiés de la ville avait été complètement vidé. Apparemment incapables de stopper la progression des rebelles au sol, les FAZ semblent miser sur leur supériorité aérienne depuis Kisangani, où elles ont établi le QG de leur « contre-offensive foudroyante ».
mardi 25 février
Un témoin occidental affirme dans un rapport remis au Conseil de sécurité des Nations unies que les rebelles Tutsis de Kabila ont massacré des réfugiés hutus dans l'est du Zaïre. Ce document confirme l'existence de charniers dans la région de Katalé. « Au moins 400 000 réfugiés rwandais manquent à l'appel » affirme ce rapport. A Goma, un recensement des victimes a également pu être effectué : 2 743 corps ont été ramassés, principalement ceux de civils originaires de cette ville. Le président sud-africain Nelson Mandela a fait état, au Cap, de « beaucoup de progrès » dans les discussions de paix. Laurent Désiré Kabila est d'ailleurs arrivé en Afrique du Sud pour participer aux entretiens. Par ailleurs, le conseiller spécial de Mobutu, Honoré Ngbanda Nzambo, a rappelé « la condition sine qua non à toute négociation » : le retrait des troupes étrangères du Zaïre, y compris les mercenaires des deux côtés. Sur le terrain, les rebelles banyamulenge continuent à avancer dans deux directions : d'une part, vers Kisangani (ils en sont à deux cents kilomètres ; plus au sud vers Kindu (ils en sont à quarante kilomètres). Mais ce qui fait le plus peur aux populations, ce n'est pas tant l'avancée des rebelles que les départ des FAZ. Impayées, mal équipées et livrées à elles-mêmes, elles pillent systématiquement les villes dont elles se retirent. Dans la soirée, les FAZ auraient tendu une embuscade aux rebelles qui auraient perdu plusieurs centaines d'hommes et auraient été contraints de se replier vers l'Est.
mercredi 26 février
Malgré la débandade de l'armée zaïroise, les moyens de la Rébellion au Kivu ne sont pas illimités. Tout l'art de Kabila est alors de faire croire à une invasion du pays pour obliger Mobutu à négocier. Le président sud-africain Nelson Mandela a reçu Kabila et un émissaire du président Mobutu dans la soirée.
jeudi 27 février
Le gouvernement zaïrois et les rebelles ont reconnu séparément la nécessité de s'asseoir autour d'une table de négociation. Un sommet extraordinaire réunissant dix-sept chefs d'Etat africains aura lieu les 18 et 19 mars, soit à Lomé (Togo), Abuja (Nigéria) ou Addis Abeba (Ethiopie). Selon des sources de l'ONU, les rebelles sont entrés dans Kindu. L'armée zaïroise aurait pillé la ville avant de prendre la fuite. Des informations aussitôt démenties par Kinshasa.
vendredi 28 février
Selon des sources proches de l'organisation onusienne Pam, des réfugiés rwandais ont commencé à quitter le camp de Tingi Tingi, qui abriterait quelque 120 000 personnes près de Lubutu. La rébellion a en effet annoncé qu'elle était prête à intervenir pour, a-t-elle déclaré, « libérer » les réfugiés « otages » des ex-FAR (Forces armées rwandaises) et des miliciens hutus (Interhamwes). L'OUA a annoncé un sommet extraordinaire sur le Zaïre, le 26 mars, à Lomé. Le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a relancé l'idée de l'envoi dans la région d'une force multinationale.
dimanche 2 mars
Kabila a annoncé la « chute totale » de Kindu ainsi que la prise des camps de Tingi Tingi et de la ville proche de Lubutu. A Kindu, la Croix-Rouge a dénombré trois morts civils - des enfants - et dix ou onze tués parmi les extrémistes hutus réfugiés au Zaïre, et qui opposent davantage de résistance aux rebelles que les FAZ. Selon Kabila, ses soldats ne seraient plus qu'à vingt-trois kilomètres de Kisangani (vers laquelle marcheraient les réfugiés de Tingi Tingi). Kabila a également révélé avoir rejeté un projet de cessez-le-feu présenté par les Américains et les Sud-Africains. Il exige un engagement écrit de Mobutu (qui se trouve toujours en France) avant toute négociation.
mardi 4 mars
Une centaine de rebelles ont été repérés à une quarantaine de kilomètres au nord de Kisangani, près de Bangamisa. Le porte-parole de la rébellion a annoncé la chute de Manono (ville minière du Shaba). Comme souvent, la ville serait tombée sans combat, après la fuite des forces gouvernementales. Face à cette situation catastrophique, le ministre zaïrois des Affaires étrangères a demandé à l'ONU de rendre opérationnel son plan de paix.
mercredi 5 mars
Les Etats-Unis ont demandé à Kabila d'autoriser l'ouverture de « couloirs humanitaires », afin de permettre le passage vers le Rwanda de quelque 200 000 réfugiés. De son côté, le gouvernement zaïrois a annoncé qu'il avait donné l'ordre de quitter le pays à une quarantaine de personnes travaillant pour des organisations humanitaires des Nations unies. Il les rend directement responsables d'une « hécatombe » de 25 000 morts du fait de leur abandon « précipité » du camp de Tingi Tingi, sans fournir la moindre preuve de l'existence d'une telle tragédie.
jeudi 6 mars
Le gouvernement zaïrois a accepté le plan de paix proposé par les Nations unies, mais la rébellion le rejette. « Imposer le cessez-le-feu c'est être contre nous », expliquait Kongolo Mwenze, « ministre » de la Justice de l'Alliance rebelle. Dans la soirée, reconnaissant pour la première fois la présence de rebelles à moins de cent kilomètres de Kisangani, le ministère zaïrois de la Défense a évoqué de violents accrochages ayant fait 114 morts parmi les rebelles à hauteur de Panga.
vendredi 7 mars
L'armée zaïroise a considérablement renforcé la défense de l'aéroport de Kisangani, sur laquelle convergent trois colonnes de rebelles. Des renforts ont été acheminés, y compris des mercenaires, et des explosifs ont été placés le long des pistes, qui ont été un moment interdites au trafic aérien. A Kinshasa, les forces de l'ordre ont dispersé un rassemblement organisé par l'un des principaux partis d'opposition, l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Plusieurs personnes ont été interpellées, dont l'un des dirigeants du mouvement, Adrien Phongo. C'est l'aile radicale de ce parti qui avait appelé à cette « marche pour des négociations quadripartites » sur l'arrêt des combats dans l'est du pays. Son chef, l'ancien Premier ministre Etienne Tshisekedi, tente de s'inviter à d'éventuels pourparlers entre Mobutu et Kabila.
lundi 10 mars
Kabila a été accueilli comme un sauveur à Kindu. Cette visite traduit l'assurance croissante de la rébellion qui ne craint même plus les attaques aériennes des forces gouvernementales et qui a annoncé la chute du port de Moba, le dernier que tenait encore l'armée zaïroise sur le lac Tanganyika. Le fils du président Mobutu a annoncé que son père pourrait regagner son pays cette semaine. Par ailleurs, la France envisage la création d'un mini-pont aérien humanitaire pour venir en aide aux réfugiés d'Ubundu qui fuient l'avance des rebelles. Dans la soirée, Kabila a annonce que des « combats » ont éclaté près de Kisangani et que beaucoup d'accrochages étaient signalés aux abords de cette ville. A l'entendre, certains de ses hommes auraient réussi à s'infiltrer dans le dernier fief des forces gouvernementales avec comme mission immédiate d'« observer ». D'après des informations recueillies à Kindu, au moins trois colonnes de rebelles se sont engagées pour la prise de la ville.
mardi 11 mars
Au cours d'un meeting qui a rassemblé 10 000 personnes à Kindu, Kabila a rejeté « l'appel solennel » - le troisième en six mois - lancé le matin même par le président français Chirac pour que la communauté internationale « prenne ses responsabilités » en vue d'obtenir l'arrêt des combats.
mercredi 12 mars
L'armée zaïroise a envoyé des renforts en hommes et en matériel vers la ville de Kindu. Ces renforts visent à contrer une progression éventuelle des rebelles vers les mines de diamants du pays. Les 75 000 à 100 000 réfugiés du camp d'Ubundu, à une centaine de kilomètres au sud-est de Kisangani ont lancé un appel désespéré aux quelques journalistes qui se sont hasardés dans la région. Persuadés que les combattants de l'Alliance des forces démocratiques de Kabila veulent leur mort, les réfugiés rwandais n'ont plus qu'un rêve : franchir le fleuve Zaïre pour se réfugier sur l'autre rive.
du jeudi 13 au vendredi 14 mars
Entre deux et trois cents réfugiés hutus ont péri noyés en essayant de traverser le Zaïre sur de frêles embarcations.
nuit du vendredi 14 au samedi 15 mars
Le maréchal-président Mobutu a été hospitalisé en d'urgence à l'hôpital Princesse Grâce de Monaco.
samedi 15 mars
Les forces rebelles se sont emparées de Kisangani. Kabila ne veut toujours pas entendre parler de trêve. Il veut d'abord engager des négociations avec le régime de Kinshasa. Le cessez-le-feu ne peut intervenir qu'après.
dimanche 16 mars
Les rebelles ont pris Pweto, à la frontière zambienne. Kabila a l'intention de « libérer tout le pays ». Il ira « jusqu'à Kinshasa ».
mardi 18 mars
Kabila a annoncé un cessez-le-feu de sept jours limité à la région de Kisangani, pour permettre de secourir les réfugiés, pendant que son « armée de libération » poursuit sa progression vers Lubumbashi. Kabila a pronostiqué son arrivée à Kinshasa « avant juin ». On prend la menace très au sérieux dans la capitale zaïroise : plusieurs membres de la famille de Mobutu ont traversé le fleuve pour se réfugier à Brazzaville. Dans la soirée, le Parlement, réuni en session extraordinaire, a destitué, bien que les trois quart des parlementaires n'étaient pas présents comme l'exige la constitution, le Premier ministre Léon Kengo Wa Dondo, considéré comme responsable de la déroute des FAZ. Léon Kengo a appris sa destitution à Nairobi (Kenya) où il venait d'arriver pour participer à un mini-sommet africain sur la situation au Zaïre.
mercredi 19 mars
Sur le plan politique aussi, le Zaïre tient avec des bouts de ficelle. L'opposition et Etienne Tshisekedi profitent des revers militaires du pouvoir pour établir des contacts avec la rébellion afin d'« éradiquer ensemble la dictature ». Et surtout, malgré sa destitution, le Premier ministre Kengo continue de représenter officiellement le Zaïre au sommet de Nairobi. A Kinshasa, l'exécutif conteste en effet son éviction. Sur le terrain, alors que Kisangani retrouve une vie normale, Lubumbashi attend l'arrivée du « libérateur ».
jeudi 20 mars
Dans la soirée, de sa villa française, le président Mobutu a appelé « à un cessez-le-feu » et à la création d'« un Conseil national représentant les divers courants et sensibilités ». Il entend même remettre sur les rails le processus de démocratisation prévu depuis des années et qui aurait dû aboutir à la fin de l'année à l'adoption d'une nouvelle Constitution et à des élections générales. Sur le plan militaire, les rebelles ne sont plus qu'à deux cents kilomètres de Lubumbashi et ne trouvent guère de résistance sur leur chemin. A Kisangani, les soldats réguliers de la FAZ, qui s'étaient cachés dans la forêt, se rendent par dizaines. La situation est si tendue que la France, l'Allemagne et la Suisse, après la Belgique et les Etats-Unis, recommandent à leurs ressortissants de quitter provisoirement le pays si leur présence n'est pas indispensable.
vendredi 21 mars
Laurent-Désiré Kabila a été accueilli par une foule en délire à Kisangani ; le maréchal Mobutu est rentré le même jour à Kinshasa sans accueil officiel.
samedi 22 mars
A Kisangani, la rébellion a fait élire les nouvelles autorités administratives du Haut-Zaïre par moins de 10 000 personnes, en recourant à une notion assez floue de « démocratie directe ». Kabila a lui-même annoncé que le premier gouvernement de transition serait formé pour un an, « exclusivement » par l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre. Tous les partis politiques autres que l'Alliance rebelle sont interdits pendant toute la durée de la « guerre de libération ».
dimanche 23 mars
Mobutu a fait sa première apparition publique devant quelques journalistes qu'il a reçu à sa résidence du camp militaire de Tshatshi, dans la banlieue de Kinshasa. Un peu plus tôt, il avait reçu le vice-Président sud-africain, Thabo Mbeki, qui tente toujours d'organiser des pourparlers entre le chef de l'Etat zaïrois et le leader des rebelles, Kabila, qui contrôlent un tiers du pays.
lundi 24 mars
« Si c'est cela le prix de la paix, nous sommes prêts à dialoguer avec Kabila ». C'est ce qu'a déclaré, dans la soirée, Banza Mukalay, vice-Premier ministre zaïrois et vice-président du Mouvement populaire de la révolution (MPR), le parti de Mobutu. Mukalay plaide aussi pour la poursuite du processus démocratique. Et pour preuve de bonne volonté, Mobutu a « pris acte » de la destitution de son Premier ministre Kengo Da Dondo. Le problème c'est que Kabila n'a aucune envie de négocier. Par ailleurs, Brazzaville, la capitale du Congo, située sur la rive en face de Kinshasa, en envahie par les dignitaires zaïrois et leurs familles. Cent marines américains et un bataillon français et cinq cent para-commandos belges y ont aussi débarqué pour couvrir d'éventuelles opérations d'évacuation.
mardi 25 mars
Kabila semble faire une concession, annoncée par le canal du gouvernement sud-africain. Le leader des rebelles qui avait d'abor exigé des négociations directes avec le président Mobutu, accepte maintenant de rencontrée une délégation envoyée par celui-ci. Il impose tout de même des limites à cette rencontre : elle devra avoir lieu ailleurs qu'au Zaïre et elle aura un caractère unique puisque, si elle échoue, il ne sera plus question de négocier... A Kinshasa, Banza Mukalay a admis le principe d'un « partage du pouvoir » avec la rébellion... Par ailleurs, plus de 14 000 réfugiés hutus rwandais sont arrivés à sept kilomètres de Kisangani, où ils tentent de s'organiser tant bien que mal sans la moindre assistance des organisations humanitaires.
mercredi 26 mars
Ouverture du sommet de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) à Lomé. Ce sommet extraordinaire est essentiellement consacré au Zaïre. Pour la première fois, des représentants des rebelles et des autorités zaïroises se sont retrouvés. A Londres, Bizima Karaha, « ministre des Affaires étrangères » de Kabila a rejeté catégoriquement l'idée d'un partage du pouvoir. Ce même jour, à Paris, Nzanga Mobutu, fils et porte-parole du chef d'Etat, réaffirme la position paternelle : « Pas de négociation sans un cessez-le-feu préalable ».
Le Haut commissaire de l’ONU aux réfugiés, Sadako Ogata, a demandé aux rebelles qui contrôlent l’est du Zaïre de laisser des dizaines de milliers de réfugiés rentrer au Rwanda après cinq mois d’une épuisante errance à travers la jungle et la guerre.
jeudi 27 mars
La rébellion et les autorités de Kinshasa se sont engagées à « respecter le principe du cessez-le-feu et le principe de négociations ». C'est ce qu'indique le communiqué final du sommet de Lomé. Par ailleurs, un train du PAM a apporté 120 tonnes de nourriture aux réfugiés qui sont sur la route entre Ubundu et Kisangani. C'est la première aide qu'ils ont reçue depuis un mois.
samedi 29 mars
Un employé du PAM a vu des « centaines de corps » de réfugiés rwandais morts, en survolant la route qui va de Kisangani à Ubundu, 150 kilomètres plus au sud. Quelque 100 000 réfugiés hutus sont disséminés rwandais sont entre ces deux villes : les rebelles refusent de les laisser entrer dans Kisangani et les repoussent vers le sud.
du samedi 29 au dimanche 30 mars
La rébellion s'est emparée de Kasenga, à 216 kilomètres au nord de la capitale du Shaba, et Kamina, un important noeud ferroviaire (400 kilomètres au nord-ouest de Lubumbashi) : la capitale du cuivre est désormais coupée de son lien ferroviaire avec Kinshasa.
dimanche 30 mars
L'Afrique du Sud vient d'annoncer que les autorités de Kinshasa et la rébellion zaïroise ont accepté d'engager le 3 avril des « négociations effectives », quelque part sur le territoire sud-africain. Leur objet : préparer une rencontre entre Mobutu et Kabila, pour définir les modalités de transition. En attentant, la rébellion refuse toujours toute idée de cessez-le-feu. Elle poursuit donc son offensive en direction de Lubumbashi, dont elle prédit la chute « imminente » et d'où commencent à fuir les familles des militaires.
lundi 31 mars
Les rebelles ont chassés les réfugiés hutus qui campaient depuis quelques jours à Lula, à sept kilomètres au sud de Kisangani. Ils ont ordonné à tous les réfugiés de quitter les abords de la ville et de se mettre en route pour Ubundu, 150 kilomètres plus au sud.
mercredi 2 avril
L'opposition a choisi son leader, Etienne Tshisekedi, pour être le nouveau Premier ministre de Mobutu. Mais déjà, la rébellion a rejeté sa nomination. Sur le terrain, le général Mosala, est arrivé à Lubumbashi, la capitale du riche Shaba.
jeudi 3 avril
Tshisekedi propose d'offrir six fauteuils dans le gouvernement qu'il vient de créer à la rébellion de Kabila. Laquelle a aussitôt rejeté l'offre, rappelant que son objectif était le départ du président Mobutu. Et pour compliquer un peu plus les choses, voici que Tshisekedi, soutenu par la France et la Belgique mais froidement accueilli à Kinshasa, juge maintenant que la rencontre de Pretoria (Afrique du Sud) entre rebelles et représentants de Mobutu, n'est pas « utile ». Dans la soirée, les rebelles ont reconnu qu'ils « progressaient lentement » vers Lubumbashi.
vendredi 4 avril
Les rebelles ont pris le contrôle de la capitale zaïroise du diamant, Mbuji Mayi (sud-est). Avant leur arrivée dans la ville, les soldats de l'armée zaïroise se sont livrés à des pillages puis ils se sont enfuis, selon un scénario désormais bien réglé.
samedi 5 avril
Des organisations ont découvert 180 cadavres dans les camps de Kasese et Biaro, qui abritent respectivement 50 000 et 30 000 réfugiés. L'Alliance rebelle de Kabila a donné son feu vert pour utiliser l'aéroport de Kisangani pour rapatrier les réfugiés hutus vers le Rwanda.
dimanche 6 avril
Les véritables négociations inter-zaïroises (Kamanda Wa Kamanda représentant Mobutu, et le Dr Bizima Karaha représentant Kabila) pour mettre fin à six mois de guerre dans l'est du Zaïre ont débuté à Pretoria (Afrique du Sud) dans le secret. A Kinshasa, le président Mobutu a pressé Kabila de négocier « afin de restaurer la paix dans le pays ». A Goma, les rebelles affirment que la prise de Lubumbashi n'est plus qu'une question d'heures.
lundi 7 avril
Les rebelles s'apprêtent à s'emparer sans grande difficulté de Lubumbashi. A l'aube, ils ont pris Kushi, une ville frontalière à trente kilomètres de la capitale du Shaba où de nombreux soldats des forces régulières arborent déjà bandeaux et drapeaux blancs en signe de ralliement à l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo. Une douzaine d'officiers et sous-officiers ont même lancé un appel à déposer les armes et souhaitaient la « bienvenue » aux rebelles. Appel désavoué par le général Molemba, commandant de la région militaire, qui a affirmé « la situation en main ». La principale inconnue reste l'attitude de la Division de la sécurité présidentielle (DPS), une unité d'élite dont les chefs affirment vouloir résister aux troupes de Kabila. Pendant ce temps, les discussions entre les représentants de Mobutu et de Kabila se sont poursuivies à Pretoria, pour la troisième journée consécutive, dans le plus grand secret. A Kinshasa, c'est la confusion la plus totale, le Premier ministre Tshisekedi a rejeté l'Acte constitutionnel de la transition, sur la base duquel il avait été désigné. Il a aussi récusé le Haut conseil de la république/Parlement de transition (HCR-PT). Celui-ci devait se réunir pour débattre d'une éventuelle déposition de Tshisekedi. Mais, il a finalement renoncé à se réunir après que le Premier ministre ait fait manifester ses militants « purs et durs » dans le centre de la capitale. Par ailleurs, 7 000 réfugiés, disparus depuis la prise de Goma par les rebelles, sont arrivés dans un camp au sud de Kisangani, « dans un état catastrophique » et Kabila est arrivé à Mbuji-Mayi.
mardi 8 avril
L'aéroport de Lubumbashi a été fermé au trafic civil. Dans le centre de la ville, les seuls qui osent s'aventurer dehors se pressent devant le supermarché en gros pour acheter des vivres en réserve. Quelques soldats circulent à bord de camionnettes « réquisitionnées » pour l'effort de guerre. Mais il n'y a pas encore eu de pillages de maisons et de magasins, tant redoutée par la population. La résistance de la DPS semble avoir surpris les troupes de Kabila, qui seraient à dix kilomètres. Des obus de mortier ont été tirés pendant près d'une heure au lever du jour, à l'extérieur de la ville, dans le nord et l'ouest. L'armée zaïroise tenterait une contre-offensive sur Kushi. Des renforts gouvernementaux ont été acheminés à Lubumbashi. A Mbuji-Mayi, Kabila a annoncé, devant plusieurs dizaines de milliers de personnes, que ses hommes, déployés sur le front nord, se trouvaient à 260 kilomètres au nord-est de Kinshasa et avaient pris Lisala, ville natale de Mobutu. A Pretoria, les délégations zaïroises ont décidé d'ajourner leurs entretiens sans décider d'un cessez-le-feu. A Kinshasa, plusieurs personnes ont été blessées dans les incidents qui ont éclaté lors des manifestations organisées par les partisans de Tshisekedi. Le président de la Commission du contentieux du parlement de transition, Emmanuel Lusambo, a été grièvement atteint par une pierre jetée par l'un des manifestants.
mercredi 9 avril
Le général Likulia Bolongo a été nommé Premier ministre, en remplacement de Tshisekedi, désavoué par les partis. Sur le terrain, les rebelles ont commencé la prise de Lubumbashi.
jeudi 10 avril
Les troupes rebelles de Kabila ont achevé la prise de Lubumbashi en contrôlant l'aéroport ou 300 FAZ et DPS s'étaient réfugiés : l'ère Mobutu touche à sa fin, d'autant que Américains, Belges, Britanniques et Sud-Africains estiment qu'il doit céder la place. Les habitants de la capitale du Shaba ont accueilli en « libérateurs », par des cris de joie, les rebelles.
dimanche 13 avril
C'est dans la plus grande confusion que le nouveau Premier ministre, le général Likulia Bolongo, a pris ses fonctions. C'est la première fois, depuis 1990, qu'un gouvernement est dirigé par un militaire. Sur le plan militaire, Kabila marque encore des points : ses hommes sont arrivés à la frontière de la Zambie (qui les soutient) et ont conquis les villes de Kananga, capitale du Kasaï occidental, et de Kolwezi (Shaba) où les soldats se sont aussitôt rendus. Kabila affirme par ailleurs que la rébellion se trouve à 300 kilomètres seulement de Kinshasa, et qu'elle y entrerait « bien avant juin ». Sur le plan politique, le rapport de force n'est guère plus favorable à Mobutu. Kabila vient de lui faire une offre directe de rencontre annonçant qu'il va « voyager prochainement » en Afrique du Sud pour « dynamiser les négociations ». Mais Mobutu rejette « l'ultimatum d'un chef de bande », mais « ne refuse pas de parler » au chef de la rébellion. La situation humanitaire est quelque peu occultée par les évènements politiques et militaires. Pourtant, selon le HCR, au moins 600 réfugiés sont morts en une semaine autour de Kisangani où le choléra, la dysenterie et le paludisme menacent 80 000 personnes. Et quarante-six Libanais, à qui les rebelles réclament une rançon de 750 000 dollars chacun (4,5 millions de francs) sont bloqués dans la ville diamantifère de Mbuji-Mayi.
lundi 14 avril
Kabila est arrivé à Lubumbashi où il a été accueilli par des milliers d'habitants manifestant leur joie. Mais pour la première fois depuis le début de sa fulgurante avancée dans l'est du pays, il pourrait être confronté à une situation politique délicate : des jeunes gens de l'Uféri, important parti du Katanga, ont pris à partie, dans la matinée, le nouveau gouverneur intérimaire nommé par l'AFDL, Gaëtan Kakuji, pour connaître la date des futures élections. A Kinshasa (quatre millions d'habitants), la journée « ville-morte » à laquelle l'opposition appelait la population pour pousser le président à quitter le pouvoir, a réussi à paralyser la capitale sans dérapage grave. La garde civile a toutefois tiré en l'air pour disperser des manifestants près de la résidence de Tshisekedi. Quant à Mobutu, il « envisage » maintenant de rencontrer Kabila.
mercredi 16 avril
La panique gagne les Kinois alors que court la rumeur de l'arrivée prochaine des rebelles. Leur chef, Kabila, était chez le Sud-Africain Mandela pour parler avec lui de l'avenir du Zaïre. A Kinshasa, Mobutu s'est trouvé un nouveau bouc émissaire, l'ancien Premier ministre Léon Kengo wa Dengo. Ses compatriotes ne sont pas dupes. Les rebelles sont entrés dans la province de Bandundu, principal grenier de la capitale zaïroise (70 % des denrées alimentaires). Le prix de certains aliments a déjà commencé à grimper rapidement. De leur côté, des militaires s'inquiètent de la présence dans la capitale de dizaines de milliers d'éléments de la DSP et de la garde civile. Ces derniers craignent que les FAZ désertent ou rallient Kabila.
jeudi 17 avril
Vingt-quatre heures après la visite de Kabila au président Mandela, le gouvernement sud-africain a fait savoir qu'il avait invité le chef des rebelles zaïrois et le maréchal Mobutu à se rencontrer rapidement en territoire sud-africain pour trouver une solution au problème du Zaïre. D'après Mandela, Kabila, qui annulé au dernier moment, un meeting à Lubumbashi, « veut une solution qui ait le soutien du président Mobutu ; il ne fera donc rien pour humilier » le maréchal-président. Même opinion du côté des banquiers suisses. Pour Berne, il serait inopportun de geler les avoirs du président zaïrois. D'autre part, les rebelles viennent de conclure avec le géant minier American Minerai Fields un contrat pour reprendre une bonne partie des activités de la Gecamine, la société d'Etat qui exploite le cuivre et le cobalt.
vendredi 18 avril
Devant les difficultés créées par les rebelles zaïrois, le HCR a renoncé à rapatrier vers le Rwanda les dizaines de milliers de Rwandais qui s'entassent près de Kisangani, dans les camps de Kasese 1 et 2. L'explication des rebelles, c'est qu'il y aurait déjà plus de 300 cas de choléra. D'autant plus préoccupant que ses entrepôts, situées dans la gare de chemin de fer, sur la rive gauche du Zaïre, face à Kisangani, ont été pillés par plus de 300 personnes venues en pirogue de l'autre bord et armées de machettes et de bâtons : « quatorze tonnes de farine et trois tonnes de petits pois » ont disparu. Enfin comme un malheur n'arrive jamais seul, le HCR s'est fait délester de 60 000 litres de carburant à Goma par les forces rebelles. Par ailleurs, les pluies torrentielles qui se sont abattues depuis le début de la semaine sur la région de Kisangani ont noyé sous la boue les camps de réfugiés du secteur. Selon la Croix-Rouge, il y aurait au moins dix-huit morts (surtout des enfants, décédés de froid et d'épuisement). A Kinshasa, le maréchal Mobutu a annoncé officiellement qu'il acceptait de rencontrer dans les prochains jours son vieil ennemi Kabila en Afrique du Sud. Pour sa part, la rébellion n'a aucune intention d'assouplir sa position. Bizima Kahara, « ministre » des Affaires étrangères et négociateur de l'Alliance, a maintenu la position intransigeante de Kabila en réaffirmant que Mobutu devait « quitter le pouvoir » et qu'« aucun cessez-le-feu » n'était possible « avant la fin de la guerre ».
samedi 19 avril
Au cours d'un meeting à Lubumbashi, le rebelle Kabila s'est refusé à négocier autre chose que le départ de Mobutu. La guerre doit aller, a-t-il dit, jusqu'à Kinshasa. Ce « libérateur » commence à inquiéter les milieux politiques zaïrois. Ces inquiétudes sont confortées par la suspension des partis dans les territoires qu'il occupe et par la récente mise en résidence surveillée à Goma du numéro un de la compagnie de diamants du Kasai-Oriental, la Miba, et du gouverneur du Shaba (Kabila a nommé à sa place son secrétaire général, Gaëtan Kakuji), deux personnalités qui comptent dans leur région d'origine. De plus, après la prise de la capitale du diamant, Kabila aurait, selon différentes sources, emporté 483 000 carats et détourné toutes les devises trouvées dans les coffres-forts de la compagnie minière à Mbujumyi.
lundi 21 avril
D'importants pillages par la population locale de la région de Kisangani ont provoqué dans la matinée une suspension des activités humanitaires dans les camps de Kasese et Biaro, un peu plus au sud. Ces pillages auraient été provoqués par les meurtres de six Zaïrois, dont les réfugiés ont été accusés.
mardi 22 avril
Le président Mobutu a invoqué son état de santé pour refuser de se rendre en Afrique du Sud, le seul pays où Kabila acceptait de le rencontrer. Mais la santé du président zaïrois est loin d'être le seul obstacle. Mobutu pose toujours comme préalable à toute discussion la proclamation d'un cessez-le-feu et la possibilité de se présenter à des élections. La tension est montée d'un cran dans le fief rebelle de Goma après des tirs d'armes automatiques : « Un malentendu entre soldats », affirme un responsable rebelle.
mercredi 23 avril
Les rebelles ont poursuivi leur progression vers Kinshasa avec la prise de deux nouvelles villes (Ilebo et Tshikapa dans le Kasaï occidental), mais Kabila est, plus que jamais confronté à l'épreuve du pouvoir. De sérieuses divergences semblent voir le jour entre les rebelles et le Rwanda ainsi qu'entre les différentes composantes ethniques de la rébellion. Des affrontements ont opposé les nouvelles recrues venues du Shaba et les Tutsis ramenés par Kabila. Des officiers non-tutsis veulent se « libérer » de la tutelle de ces derniers très présents aux postes de commandement. Par ailleurs, le HCR a de « fortes indications » selon lesquelles les quelque 55 000 réfugiés rwandais du camp de Kasese (près de Kisangani) étaient en train de partir vers le Sud.
jeudi 24 avril
L'inquiétude grandit chaque jour sur le sort des réfugiés de l'est du Zaïre, sous le contrôle de la rébellion. Le secrétaire général de l'Onu accuse les rebelles de laisser les réfugiés mourir de faim en refusant aux organisations humanitaires de leur porter secours et de les rapatrier, comme prévu, par un pont aérien qui aurait du commencer la semaine dernière. Une mission humanitaire, qui s'est rendue sur place, affirme que le camp de Kasese, qui abritait 55 000 réfugiés hutus rwandais, est vide. Soupçonnée de massacres, la rébellion accuse les miliciens hutus rwandais qui se trouvent parmi les réfugiés eux-mêmes.
vendredi 25 avril
Des informations du même ordre que la veille sont parvenues de Biaro, à quarante kilomètres de Kisangani. Le camp qui abritait quelque 30 000 réfugiés rwandais est vide...
samedi 26 avril
Dans la soirée, une vingtaine de rebelles ont enlevés cinquante enfants rwandais et les adultes qui étaient avec eux, dans un hôpital pédiatrique proche de Bukavu. Ils ont battu deux infirmières et une aide-soignante qui tentaient de s'interposer.
dimanche 27 avril
Kabila a annoncé que certains de ses hommes sont infiltrés à Matadi, passage obligé de toutes les importations vers Kinshasa. Dans la capitale, on soutient que l'entourage de Mobutu a déjà préparé son plan afin de prendre la population en otage. Ils sont prêts à se servir des Kinois comme « boucliers », a révélé un sous-officier du ministère de la défense, ajoutant que les officiers proches du maréchal ont juré de ne pas mourir seuls. Des tracts circulent, portant les noms de proches du président et d'officiers bandits (ethnie du maréchal) qui seront exécutés dès que la capitale tombera aux mains de la rébellion. Sortant du mutisme qu'il affichait depuis plusieurs jours à l'égard des médias internationaux, Kabila a donné une conférence de presse à Kisangani. Le leader de la rébellion a annoncé qu'il avait donné au HCR soixante jours pour rapatrier les réfugiés hutus rwandais de la région de Kisangani. Aux accusations de l'ONU, qui parle à mots à peine couverts d'« extermination délibérée », le chef de la rébellion répond que le drame vécu par ces milliers de personnes n'est qu'un « petit problème ». Mais, l'ONU a enfin pu rapatrier trente-trois réfugiés dans un de ses avions, directement de Kisangani vers Kigali. Une douzaine d'autres, trop faibles pour supporter le voyage, sont restés sous sa protection. En outre, grâce à un vol de reconnaissance dans la région, le HCR pense avoir repéré quelques centaines de réfugiés en fuite dans une partie très dense de la forêt.
Qualifications pour la Coupe du monde de football 1998 : à Lomé (Togo), le Zaïre a été battu par l’Afrique du Sud deux buts à un.
lundi 28 avril
Les organisations humanitaires n'ont retrouvé que quelques milliers de réfugiés hutus rwandais non loin de Kisangani. Ils ont regagné le camp de Biaro. Il en manque toujours plus de 80 000. Le silence des rebelles parait de plus en plus coupable. Un soldat rebelle a même avoué que tous les jours, la rébellion « capture les réfugiés rwandais et les tue ». Pendant ce temps, les troupes rebelles continuent à avancer : la ville de Kilwit (300 000 habitants, à 450 kilomètres à l'est de Kinshasa), dernière défense de Kinshasa, est tombée comme un fruit mûr...
mardi 29 avril
Après des semaines de tractations, un sommet Mobutu-Kabila s'annonce. Sur un navire militaire sud-africain, au large de Cabinda (Angola), et « avant la fin de la semaine, si les parties ne changent pas d'avis ». Mais les deux parties ne semblent pas d'accord, pour l'heure, sur l'objet de ce sommet.
jeudi 1er mai
Kabila a promis de tenter de résoudre pacifiquement la crise, tout en déclarant que ses hommes continueront à marcher sur Kinshasa.
vendredi 2 mai
La rencontre à bord de l'Outeniqua, entre Mobutu et Kabila, a été repoussée au lendemain. Seul Mobutu s'est présentait, accompagné de deux de ses enfants, d'une quinzaine de membres de son service de sécurité et de son ministre des Affaires étrangères. Il a été accueilli par le président sud-africain Nelson Mandela. Sur place, la guerre se poursuit : Lisala, le ville natale de Mobutu, après avoir été pillée par les troupes gouvernementales, est tombée aux mains de la rébellion sans offrir la moindre résistance.
dimanche 4 mai
Le président sud-africain Nelson Mandela finissait par désespérer de réunir sur son bateau, l'Outeniqua ancré dans le port congolais de Pointe-Noire, Mobutu et Kabila. Il aura fallu qu'il élève sérieusement le ton pour convaincre l'un et l'autre de se parler. Quatre-vingt-dix minutes de face à face, le premier entre les deux hommes, auront suffi. Kabila, qui contrôle les deux tiers du territoire zaïrois, a donné l'ordre à ses troupes de cesser leur progression sur tous les fronts, sans toutefois véritablement accepter le cessez-le-feu. Mobutu, pour sa part, a proposé la mise en place d'un processus de transition suivi d'élections au Zaïre, auxquelles il ne se présenterait pas. Une autorité de transition organiserait les élections. Cela dit, aucun calendrier n'a encore été fixé. Kabila et Mobutu sont juste convenus de se revoir dans un délai de dix jours. En fait, le chef rebelle voudrait que sa formation, l'AFDL, prenne le pouvoir comme autorité de transition et que Mobutu lui cède la place. « La fin des hostilités sera la conséquence de ce processus », a précisé le communiqué officiel publié dans la soirée. Par ailleurs, comme si la faim et l'épuisement ne suffisaient pas, 91 réfugiés rwandais sont morts écrasés et étouffés, dans la soirée, à bord du train qui devait les ramener du camp de Biaro jusqu'à Kisangani, puis pour s'envoler vers le Rwanda. Depuis le début du pont aérien, le 30 avril, plus de 5 000 réfugiés ont ainsi pu être rapatriés. Aujourd'hui, ils ont été plus de mille à arriver au Rwanda sains et sauf.
lundi 5 mai
Laurent-Désiré Kabila a annoncé que ses troupes continuaient leur progression vers Kinshasa (elles sont à soixante kilomètres de l'aéroport) où elles devraient entrer « dans deux ou trois jours ». Les rebelles ne feront pas de quartier : « on se rend ou on est tué ». Selon divers témoignages, rebelles et forces gouvernementales renforceraient actuellement leurs positions respectives autour de la ville de Kengé, à deux cents kilomètres à l'est de la capitale. Le Premier ministre, Likulia Bolongo, affirme que des parachutistes volontaires associés à la division spéciale présidentielle « forment un verrou » autour de cette dernière ville de la région reliée par la route à Kinshasa. Les rebelles, eux, ont nettement renforcé leurs positions à Kikwit. Des troupes supplémentaires y sont arrivées par avions-cargo. Au nord, les rebelles progresseraient maintenant vers le dernier bastion de Mobutu, Gbadolite, proche de la frontière centrafricaine.
mardi 6 mai
De violents combats opposent, dans la soirée, les troupes gouvernementales aux rebelles autour de Kengé. A Kikwit, au moins cinq cents rebelles auraient été tués, selon un porte-parole du Premier ministre zaïrois. Il affirme que les FAZ sont « en passe de reprendre la ville ». Mais les rebelles affirment le contraire. Dans le même temps, le président Mobutu, à qui le chef rebelle a donné huit jours pour se démettre, a annoncé compter se rendre à Libreville, au Gabon, où il rencontrera quatre de ses homologues d'Afrique centrale. Selon un conseiller, ce déplacement pourrait être une escale avant de rejoindre la France. Signe des temps, les FAZ ont pillé la localité de Gbadolite, où se trouve le palais de Mobutu. Par ailleurs, dans l'après-midi, 271 enfants de Hutus rwandais sont montés dans un gros avion cargo Ilyouchine, qui les a ramenés de Kisangani jusqu'à Kigali. Depuis le début du pont aérien pour le rapatriement des réfugiés rwandais, neuf cents enfants ont été ramenés par avion au Rwanda, où les organisations humanitaires tentent de retrouver leur famille, proche ou éloignée. Quatre-vingts autres enfants sur 230, qui devaient être rapatriés la veille, ont été blessés par balles ou par des coups de machette. Emma Bonino, commissaire européen chargé de l'action humanitaire déclare que l'est du Zaïre « a été transformé en véritable abattoir ».
mercredi 7 mai
Dans leur marche sur Kinshasa, les rebelles se sont heurtées, pour la première fois à une vive résistance des FAZ. Selon des sources rebelles et diplomatiques, les combats font rage à Kenge. Médecins sans frontières fait état de deux cents morts parmi les civils. Parmi les tués figurent dix secouristes de la Croix-Rouge zaïroise.
jeudi 8 mai
De violents combats se poursuivent à Kenge. Des chiffres contradictoires circulent sur les pertes militaires qui semblent élevées de part et d'autre. A Kikwit, des affrontements continuent, des éléments des forces zaïroises isolés, ayant constitué des poches de résistance face aux rebelles qui tiennent la ville. Sur le front du Nord, les troupes de l'Alliance assurent s'être emparées de Bandundu. Parallèlement aux combats, l'activité diplomatique se poursuit sans relâche.
vendredi 9 mai
Le sommet de Libreville, auquel participe Mobutu, invite ce dernier à passer la main et à organiser une transition « ordonnée et démocratique » au Zaïre. Kabila rejette ce scénario et continuer à faire avancer ses troupes : Bandundu est passée sous le contrôle des rebelles. Les combats font toujours rage à Kenge.
samedi 10 mai
L'archevêque de Kisangani, Laurent Monsengwo, a été élu président du Parlement de transition zaïrois. Il pourrait remplacer Mobutu en cas de démission. Kabila a déclaré qu'il ne traiterait pas avec Monsengwo mais qu'il renonçait pour le moment à prendre Kinshasa par les armes. Il a annoncé qu'il était prêt à stopper sa progression, mais pas à adopter un cessez-le-feu. Il a également confirmé qu'il rencontrerait « certainement » le président Mobutu, le 14 mai, à bord d'un navire sud-africain. Pendant ce temps, les affrontements se poursuivent toujours autour de Kenge, et Kabila affirme que ses troupes se trouvent à cinquante kilomètres de Kinshasa.
dimanche 11 mai
Le « ministre » rebelle des Affaires étrangères, Bizima Karaha, a appelé à Lubumbashi les étrangers à quitter Kinshasa. Motif : les forces gouvernementales comptent les tuer pour provoquer une intervention internationale.
lundi 12 mai
L'opposition radicale, proche de Tshisekedi, a emboîté le pas à Kabila pour rejeter l'élection de Mgr Monsengwo à la tête du Parlement de transition zaïrois. Ce parti pris inquiète la population qui craint que l'opposition prenne fait et cause pour la rébellion. Les troupes de Kabila ont par ailleurs affirmé que leur marche sur Kinshasa était « inéluctable ».
mardi 13 mai
Les rebelles ont une fois de plus claironné leur entrée imminente à Kinshasa. Cette fois, pourtant, le gouvernement ne s'est pas contenté de démentir : il a appelé la population de la capitale à se défendre. A l'issue d'une réunion du Conseil de sécurité, le ministre de l'Information a annoncé que le couvre-feu était instauré dans la capitale de vingt heures du soir à six heures du matin. Il a précisé que l'armée surveillait les endroits stratégiques de la ville et qu'elle avait reçu « l'ordre d'ouvrir le feu après trois tirs de sommation sur toute personne prise en flagrant délit de pillage ». L'Afrique du Sud a multiplié ses efforts diplomatiques pour atténuer les derniers points d'achoppement entre les deux parties et ouvrir la voie à une solution qui ne soit pas exclusivement militaire.
du mardi 13 au samedi 17 mai
La ville de Mbandaka est le théâtre du massacre de nombreuses personnes, principalement hutues.
mercredi 14 mai
Laurent-Désiré Kabila et le président Mobutu ne se sont pas rencontrés, comme prévu, dans le port congolais de Pointe-Noire (sur le navire sud-africain Outeniqua), car le chef rebelle n'est pas venu... La rencontre a finalement été annulée. Kabila était parti de son côté pour l'enclave angolaise de Cabinda où, à son tour... il attendait. Les présidents sud-africain (Nelson Mandela) et congolais (Pascal Lissouba) ont aussi attendus pour rien. Kabila s'est entretenu dans la capitale angolaise avec le président angolais José Eduardo dos Santos.
jeudi 15 mai
Après son entretien avec le président sud-africain, Nelson Mandela, dans la soirée au Cap, le chef de la rébellion zaïroise a donné quatre jours au président Mobutu pour examiner les propositions sud-africaines de passation pacifique du pouvoir.
vendredi 16 mai
A l'aube, le président Mobutu a quitté Kinshasa pour Gbadolite, sa luxueuse résidence de la jungle à 1 200 kilomètres au nord de la capitale. Ce départ a rapidement pris le sens d'un premier pas vers l'exil. Dans l'après-midi, un communiqué du Conseil des ministres informait le pays que « pour ne pas apparaitre comme un obstacle à une solution négociée et à l'ordre constitutionnel, le Président a décidé de se tenir à l'écart ». Le ministre de l'Information expliquait de son côté : « Le Président a cessé toute intervention dans la conduite des affaires de l'Etat et ne se présentera pas aux prochaines élections. Il règne mais ne gouverne pas et il conserve son titre de Président ». Alors que les rebelles sont parvenus à quelques kilomètres de la capitale, les généraux zaïrois auraient d'ailleurs manifesté leur intention de ne pas s'opposer à l'avancée des forces de Kabila. L'Alliance rebelle exigeait d'ailleurs dans la soirée « la reddition inconditionnelle de l'armée zaïroise ».
nuit du vendredi 16 au samedi 17 mai
Le ministre de la Défense zaïroise, le général Mahele, a été tué par des membres de la garde présidentielle, lors d'une visite à la caserne de la garde. Mahele leur demandait de ne pas résister à l'avance des rebelles.
samedi 17 mai
Les rebelles ont commencé l'attaque de Kinshasa : ils se sont emparés de l'aéroport international de Ndjili et du Parlement.
dimanche 18 mai
Après une nuit de violences sporadiques au cours de laquelle au moins vingt-six personnes ont été tuées, Kinshasa a retrouvé un calme relatif. A l’issue de huit mois de rébellion, la capitale zaïroise est désormais totalement contrôlée par les rebelles, après la prise du camp militaire de Tshatshi, forteresse protégeant le palais somptuaire de Mobutu. Les derniers hommes résistants de la DPS ont rendu leurs armes. Au moins deux cents personnes, majoritairement des militaires, ont été tuées depuis la veille et cinquante-deux civils blessés. La plupart des morts ont été dénombrés autour de l'aéroport international. Pour les soldats fidèles à Mobutu qui sont restés dans la ville plutôt que de prendre la fuite, l'avenir est plus qu'incertain comme le laisse présager des exécutions sommaires qui viennent d'avoir lieu. Au camp Mobutu, les militaires en ligne ont remis leurs armes aux hommes de Kabila. Un homme, poussé en avant par la foule, a été violemment interrogé et exécuté. La radio de Kinshasa, contrôlée par l'Alliance a appelé dans la soirée la population à se constituer en « groupes de défense » avant le contrôle total de la ville. Kabila se trouve toujours à Lubumbashi. L'Afrique du Sud l'a reconnu comme président de la République démocratique du Congo (Zaïre). Kabila a promis de former un gouvernement de salut national d'ici au 20 mai, d'installer dans les deux mois une assemblée constituante et d'organiser des élections d'ici à deux ans. Dans l'intervalle, le gouvernement de transition sera ouvert aux hommes politiques d'opposition - à l'exclusion de ceux qui ont soutenu le régime de Mobutu - mais à titre individuel, sans participation des 450 partis politiques. L'ex-président Mobutu a quitté Lomé (Togo) pour une nouvelle destination (Maroc ?).
mardi 20 mai
Laurent-Désiré Kabila est arrivé dans la soirée à Kinshasa. Il a attendu logiquement que la sécurité soit pleinement assurée dans les rues de la capitale, où circulent encore des soldats de l'ancien régime. L'Alliance a d'ailleurs annoncé l'arrivée prochaine de 10 000 à 20 000 hommes chargés de sécuriser la ville et ses environs. Deux hommes d'affaires français ont été assassinés par des hommes en uniforme dans une usine de la périphérie de la ville. Les nouvelles autorités de la république démocratique du Congo ébauchent leur programme. L'organisation humanitaire « Médecins sans frontières » estime à 190 000 le nombre de réfugiés hutus portés disparus dans l'est du Zaïre. Dans un rapport de dix pages, MSF affirme que l'Alliance rebelle a mis en place « une stratégie délibérée visant à l'élimination de tous les réfugiés rwandais, y compris des femmes et des enfants ». Dans le sud du Zaïre, près de la frontière angolaise, les réfugiés seraient systématiquement persécutés par les hommes de Kabila.
jeudi 22 mai
Les tractations pour la formation du gouvernement se sont prolongées à Kinshasa. Les tractations sur le rôle à réserver au chef de l'opposition au régime de Mobutu, Etienne Tshisekedi, ont retardé l'annonce de ce gouvernement. A l'étranger, la position de Kabila est confortée. Il a notamment reçu le soutien du secrétaire général de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) Salim Ahmed Salim.
nuit du jeudi 22 au vendredi 23 mai
Kabila veut exercer le pouvoir, seul. Six jours après s'être proclamé « président » de la République démocratique du Congo (ex-Zaïre), il a formé un gouvernement qui confirme sa mainmise sur le pays. Kinshasa a un nouveau gouvernement... sans Premier ministre. Etienne Tshisekedi, opposant de longue date à l'ancien président Mobutu, était pourtant considéré comme le titulaire logique de ce poste. Ce cabinet ne comporte pas non plus de titulaire pour la Défense. « Il s'agit d'un système présidentiel », a expliqué le nouveau ministre de l'Information Raphaël Genda. Sur les treize membres du gouvernement, seulement quatre responsables de l'opposition radicale ont été intégrés. L'équipe compte également deux ministres issus du Front démocratique (Santé, Poste et Télécommunications), qui ont dû toutefois rejoindre l'Alliance. Finalement, le pays se replonge dans un système de parti unique après sept années de multipartisme.
vendredi 23 mai
La nomination du nouveau gouvernement ne plait pas aux Kinois : « Nous n'accepterons jamais que Tshisekedi, qui a combattu la dictature pendant plus de vingt ans, soit combattu par Kabila et ses Rwandais ». Si la majorité des Kinois accepte que Kabila soit le chef de l'Etat, elle exige par contre que le Congo-Zaïre ne soit géré et gouverné que par les Zaïrois. Les Kinois s'interrogent et menacent de recourir aux armes pour faire partir les Rwandais : « Les forces armées zaïroises ne sont pas mortes. Elles sont plus puissantes que les Tutsis ; nous allons les chasser bientôt ». Loin des querelles de pouvoir de l'ex-Zaïre, le président déchu Mobutu a quitté Lomé (Togo) pour Rabat (Maroc), où il est arrivé en début d'après-midi accompagné de cinquante-six membres de son entourage.
dimanche 25 mai
« Il y aura des élections démocratiques après la période de transition de deux ans », a annoncé Laurent-Désiré Kabila. Face à la grogne qui s'instaure dans les rangs de l'opposition radicale, le ministre des Affaires étrangères, Bizima Karaha, a expliqué que, compte tenu de l'état dans lequel se trouve le pays, il fallait prendre le temps de créer les « conditions minimums » à l'organisation d'élections « démocratiques et libres. Nous ne voulons pas de pseudo-élections ». L'AFDL a promis la convocation d'une Assemblée constituante dans les soixante jours, en faisant appel, en priorité, aux paysans, puis aux intellectuels. Les soldats de Kabila se sont surtout distingués dans la matinée par des perquisitions dans le grand hôtel Intercontinental de Kinshasa, où logent de nombreux journalistes et diplomates. Ils disaient « rechercher des armes ». Ce qui a été mal perçu, d'autant que le personnel chargé de mener les perquisitions s'est montré brutal. Signe de détente, l'aéroport international doit être rouvert le 26 mai au trafic civil. En revanche, le port de Kinshasa reste fermé. La France et la nouvelle République démocratique du Congo ont eu leur premier contact officiel à Kinshasa. L'ambassadeur de France et un envoyé spécial du Quai d'Orsay ont été reçus par le ministre des Affaires étrangères de l'Etat qui a succédé au Zaïre sur l'échiquier international, Bizima Kahara. L'ambassadeur de France a, par ailleurs, sollicité une audience auprès de Kabila.
lundi 26 mai
Même ceux qui avaient accueilli les rebelles de Kabila à bras ouvert dans Kinshasa sont gagnés par le doute. Dans la soirée, bien que les partis eux-mêmes ne soient pas encore hors-la-loi, le nouveau pouvoir de l'ex-Zaïre a interdit toute « activité politique » dans la capitale. La colère gronde et pourrait rapidement dégénérer. Les manifestations ont été interdites (celle du 28 mai est malgré tout maintenue par ses organisateurs).
mercredi 28 mai
Les soldats de Kabila ont brutalement mis fin à la marche de quelque 2 000 partisans, à Kinshasa. Après une marche pacifique de deux heures réclamant « la démission immédiate et sans condition de Kabila », les soldats ont surgi de trois camions militaires. Leur seule présence a suffi à disloquer le cortège. Puis les troupes ont poursuivi dans les ruelles alentour les jeunes manifestants en les frappant à coups de bâton et avec des branchages. Plusieurs dizaines d'entre eux ont été embarqués vers le camp militaire de Kokolo. Une seule rafale a été tirée en l'air, semant la panique. Des dizaines de journalistes, photographes et caméramans ont été fouillés. Leurs cassettes et films ont été confisqués. L'UDPS de Tshisekedi a dénoncé la « brutalité de réaction » des soldats qui, selon elle, « montre le désarroi » des nouvelles autorités. Kabila a signé un décret-loi en quinze articles octroyant les pleins pouvoirs au président autoproclamé.
jeudi 29 mai
Kabila a prêté serment de « fidélité à la nation » (et à sa propre loi) dans le grand stade de Kinshasa. Le nouveau président dispose de tous les pouvoirs jusqu'en avril 1999, date à laquelle devrait avoir lieu, comme il l'a annoncé, les élections législatives. Plus de 50 000 personnes s'étaient rassemblées dans le stade sous des banderoles saluant le « libérateur ». Pourtant, quelques centaines d'opposants, n'ont pas craint de descendre la pelouse, juste avant la cérémonie officielle, pour manifester leur désapprobation. Les soldats en armes ne sont pas intervenus. La prestation de serment a été reçue par le président de la Cour suprême de l'époque Mobutu, qui n'a pas été dissoute, en présence du procureur général de la République et de vingt-deux juges. Assistaient également à la cérémonie, outre de nombreux ambassadeurs, les présidents angolais, rwandais, ougandais et zambiens. Autant de chefs d'Etat qui ont fortement soutenu l'ancien maquisard dans sa guerre contre Mobutu. Une des premières mesures du nouveau chef de l'Etat a été d'interdire l'usage du téléphone cellulaire aux fonctionnaires. Ils ont quarante-huit heures pour rendre cet équipement aux nouvelles autorités sous peine de sanctions.
vendredi 30 mai
Des opposants se sont manifestés dans les rues de Kinshasa. Ils étaient environ 150, groupés derrière une banderole sur laquelle on pouvait lire : « Tshisekedi est notre homme ». Leur cortège, parti de la gare centrale, a rallié le centre-ville. Ils se sont ensuite dispersés devant le domicile d'Etienne Tshisekedi, dans la banlieue de la capitale.
dimanche 1er juin
L'ambassadeur de France à Kinshasa, Michel Rougagnou, a finalement été reçu dans la matinée par Kabila. Cette audience avait été sollicitée, à la demande de Paris, une semaine plus tôt. Le nouvel homme fort de l'ex-Zaïre a affirmé qu'il attendait « beaucoup de la France » dans son projet de reconstruction du pays.
mercredi 4 juin
Lors du 33e sommet de l'OUA, qui s'est achevé au Zimbabwe, Kabila a donné son accord pour une enquête internationale sur les massacres de réfugiés hutus rwandais dans l'est du pays. Selon le secrétaire général de l'ONU, le tombeur de Mobutu a accepté de « coopérer à la fois sur l'aide aux réfugiés sur les accusations de massacre ». Kabila devrait désigner un membre de son gouvernement pour « travailler avec le HCR afin de déterminer l'ampleur du problème et agir énergiquement pour résoudre la question des réfugiés ». Kabila a accepté le retour de la commission d'enquête, mais à une condition expresse : que le Chilien Roberto Garreton n'en soit pas. Ce représentant de l'ONU avait dénoncé, au début de l'année, les massacres perpétrés dans l'est du pays.
samedi 7 ou dimanche 8 juin
Un avion de la compagnie Bazaïr s'est écrasé dans l'est du pays, faisant trente morts, les vingt-sept passagers et les trois membres d'équipage.
mardi 10 juin
Il existe de fortes présomptions que des « atrocités » continuent dans l'est de l'ex-Zaïre, a affirmé à Genève (Suisse) Brian Atwood, l'un des responsables de l'USAid, organisation humanitaire américaine, lors d'une réunion sur le sujet.
vendredi 13 juin
Selon un rapport émanant de l'Association de défense des droits de l'homme de l'ex-Zaïre (Azadho), 647 personnes au moins ont été assassinées et enterrées dans des fosses communes, à Kinshasa et dans les environs, entre le 19 et le 28 mai, c'est-à-dire après la chute de la capitale zaïroise. Les victimes sont « pour la plupart des ex-FAZ, des pillards et des innocents ». Les responsables de ces massacres sont les soldats de l'ADFL. L'Association dénonce l'indifférence des autorités à ce recours « spontané, presque naturel, à la justice au bout du fusil ».
mercredi 18 juin
Au Maroc, venant de Rabat, où il séjournait depuis sa fuite de Kinshasa, l'ancien président zaïrois Mobutu Sese Seko, soixante-six ans, est arrivé dans la soirée à Tanger. L'ex-homme fort du Zaïre, qui souffre d'un cancer de la prostate va suivre une chimiothérapie à l'hôpital Mohammed V de cette ville.
samedi 21 juin
Dans un discours prononcé ces jours derniers à Kindu et diffusé ce jour à la télévision, Kabila a révélé que de nombreux dignitaires mobutistes avaient été arrêtés et il s'est plaint de l'attitude des grandes puissances qui pressent Kinshasa de les réinstaller à leurs postes de commande. Commentaire de Kabila : « elles perdent leurs temps ». Parmi les personnes arrêtées : le président-administrateur délégué de la toute puissante société minière de Bakwanga, chargée de l'exploitation des diamants à Mbuji-Mayi, le gouverneur de la Banque nationale, son adjoint et quelques généraux.
du samedi 21 au dimanche 22 juin
Des troupes de Kabila ont été envoyées dans le nord-est du pays pour y combattre des maquisards hutus qui ont lancé, depuis cette zone, une attaque surprise en territoire ougandais. Le ministère ougandais de la Défense explique qu'il n'est pas au courant du mouvement des troupes ex-Zaïroises mais qu'il ne refusera pas leur soutien.
lundi 23 juin
La guerre civile qui fait rage au Brazzaville voisin a touché la capitale zaïroise, de l'autre côté du fleuve. Six obus sont tombés à Kinshasa, sur le camp militaire de Tshatshi.
jeudi 26 juin
Le dirigeant de l'opposition Etienne Tshisekedi a été arrêté à son domicile (avec sa femme et trois de ses enfants), dans la soirée, par une cinquantaine de soldats. Cette interpellation, effectuée peu après un discours aux étudiants de la capitale, a donné lieu à de nombreux incidents dans Kinshasa. Le leader de l'opposition s'est vu inviter, par les militaires qui ont conduit son « interrogatoire », à abandonner son action politique.
vendredi 27 juin
Etienne Tshisekedi a été libéré dans la matinée. Il a lancé un appel à la lutte contre Kabila. « J'appelle tous les partisans à combattre toutes les formes de dictatures », a-t-il notamment lancé. En signe de protestation contre cette arrestation, des opposants au nouveau régime ont brûlé dans la matinée trois camions et deux voitures dans le centre de la capitale et pillé au moins une station d'essence. Plusieurs rues ont été bloquées par des voitures enflammées. La police a du tirer pour disperser les manifestants. Il y aurait eu un blessé grave. Dans l'est du pays, les témoignages se multiplient sur les massacres de réfugiés hutus commis ces derniers mois par des soldats rwandais. Au Maroc, le maréchal Mobutu a été hospitalisé d'urgence à Rabat.
samedi 28 juin
Mobutu a subi une opération chirurgicale à Rabat.
jeudi 3 juillet
La mission d'enquête des Nations unies sur les massacres de réfugiés dans l'ex-Zaïre n'arrivera pas à Kinshasa le 7 juillet, comme prévu. Le gouvernement de la nouvelle République démocratique du Congo exige « l'identification » des enquêteurs et conteste les modalités de la mission. Kinshasa veut que les investigations couvrent la période allant de 1993 à mai 1997 pour prendre en compte les massacres des Tutsis par les réfugiés hutus rwandais et pas seulement les massacres de ces derniers par les forces liées, de près ou de loin, au nouveau régime.
mardi 8 juillet
Jacques Matanda-ma-Mboyo, responsable de la « branche armée de l'opposition radicale » de l'ex-Zaïre, a appelé, à Paris, à la constitution d'un « Front populaire de résistance armée » au régime de Kabila en République démocratique du Congo. Il s'est dit « ouvert à toutes les alliances dans la perspective de l'établissement d'un Etat de droit et pour l'éradication des milices et armées génocidaires tutsies qui occupent le pays ». Il avoue toutefois être éloigné du chef de l'opposition radicale, Etienne Tshisekedi, par « une divergence fondamentale sur les moyens de lutte » contre le pouvoir en place à Kinshasa.
samedi 12 juillet
La justice belge tente de bloquer l'ensemble des avoirs de l'ex-président Mobutu. Sa fille aînée a même été brièvement interpellée. Elle s'est vue contrainte de remettre plusieurs chèques d'un montant total de 27,75 millions de dollars, fruit de la vente du château Fond'Roy.
mercredi 16 juillet
Arrestation du directeur du journal La Référence Plus après un article mettant en doute l'avenir politique du président Kabila.
jeudi 17 juillet
Le secrétaire d'Etat adjoint Thomas Pickering a indiqué que l'aide américaine à la République démocratique du Congo « dépendra en grande partie » des réformes démocratiques, du respect des droits de l'homme, de la coopération avec les organisations humanitaires (allusion aux réfugiés rwandais hutus) et à l'instauration d'une économie de libre-échange. Malgré les réserves à l'égard de Kabila, les Etats-Unis sont prêts à débloquer un premier programme de soixante millions de francs.
vendredi 25 juillet
Kabila, qui a interdit les activités politiques dans l'ex-Zaïre depuis juin, n'y va pas de main morte : ses forces antiémeutes ont violemment dispersé, en ouvrant le feu, deux manifestations pacifiques, l'une au centre de Kinshasa, l'autre en périphérie, à Bandalungwa. Une dizaine de personnes ont été arrêtées. Une manifestante, qui portait une banderole réclamant le rétablissement des activités politiques, a été battue sans ménagement.
samedi 26 juillet
Kabila a expliqué que « les organisateurs de ces manifestations portent la responsabilité de ceux qui sont tombés sous le feu ». Il a demandé aux leaders de l'opposition de venir le voir pour lui exposer leurs revendications plutôt que d'être responsables de « troubles publics ». Les manifestations sont illégales pendant toute la période de « transition politique » du pays.
dimanche 27 juillet
Une trentaine de membres de l'entourage de l'ex-dictateur zaïrois Mobutu ont été priés par les autorités marocaines de quitter le pays dans les dix jours. Il ne s'agit pas de membres de sa famille, mais de gardes du corps ou d'anciens officiers de la sécurité.
jeudi 31 juillet
Le gouvernement de Kinshasa juge encore « prématurée » la venue au Congo-Zaïre de l'envoyé spécial de l'ONU dans ce pays, le Britannique Robin Kinloch, ainsi que celle d'une mission chargée de coordonner les efforts de développement. La cause : les Nations unies veulent depuis plusieurs semaines envoyer sur place une mission d'enquête sur les massacres de réfugiés rwandais dans l'est de l'ancien Zaïre.
dimanche 3 août
Le Togolais Atsu Koffi Amega (soixante-cinq ans), ancien président de la Cour suprême de justice du Togo, a été nommé à la tête de la mission d'enquête de l'ONU sur les massacres dans l'ex-Zaïre. Il sera assisté du procureur général adjoint du Zimbabwe, Andrew Chigorera, et d'une troisième personne encore à nommer. La mission devra rendre son rapport en décembre. Laurent Kabila avait refusé la nomination du Chilien Roberto Garreton, membre de la Commission des droits de l'homme de l'ONU, à la tête de cette mission.
mardi 5 août
Après deux jours de visite à Kinshasa, les ministres des Affaires étrangères de la troïka européenne (Luxembourg, Pays-Bas, Grande-Bretagne) vont recommander au prochain conseil des ministres de l'Union européenne la « reprise de la coopération structurelle » avec l'ex-zaïre. Il s'agit ainsi d'« assister » Laurent Kabila (en visite en Angola) dans son « programme de réformes démocratiques et de reconstruction nationale ».
du jeudi 14 au vendredi 15 août
Débarquant de pirogues bondées avec leurs matelas sur la tête, des centaines de Congolais, fuyant les affrontements à Brazzaville (Congo), arrivent à Kinshasa, de l'autre côté du fleuve.
samedi 16 août
Laurent-Désiré Kabila, le président du Congo-Kinshasa (ex-Zaïre), tente de s'imposer comme médiateur dans le conflit qui déchire son voisin du Congo-Brazzaville. Il a reçu Pascal Lissouba auquel il a transmis de mystérieuses « propositions de paix ». De leur côté, les partisans de Sassou-N'guesso ont déjà qualifié l'initiative de Kabila de « cafouillis ». Ils accusent Lissouba de faire diversion et Kabila de saboter la médiation déjà menée par le président gabonais Bongo. A Brazzaville, de violents combats à l'arme lourde ont encore eu lieu. Depuis trois jours, quelque 8 500 Congolais ont traversé le fleuve pour se réfugier à Kinshasa.
lundi 18 août
Fatigué de ce qu'il appelle « les atermoiements du Conseil de sécurité » de l'ONU, Kabila propose l'envoi dans un « bref délai » d'une force africaine à Brazzaville, pour s'interposer entre les soldats du président Lissouba et les miliciens de Sassou N'guesso. Le premier a déjà accepté. Le second n'a pas encore réagi, mais on sait que ses partisans n'apprécient guère l'interventionnisme de Kinshasa. D'autant que la force d'interposition serait composée de soldats des pays qui ont porté Kabila au pouvoir (Ouganda, Angola, Rwanda, Burundi, etc.).
mercredi 20 août
L'enquête sur les massacres de réfugiés, notamment de Hutus rwandais, dans l'ex-Zaïre, va enfin démarrer. La délégation des Nations unies, conduite par le Togolais Atsu-Kofi Amega, est attendue le 23 août à Kinshasa. L'un des membres de la mission a déjà fait part de ses inquiétudes quant à la possibilité de travailler librement.
nuit du jeudi 21 au vendredi 22 août
Au moins 120 Tutsis ont été tués au Rwanda à la machette ou au fusil par des inconnus, dans le camp de réfugiés de Mudende, près de Gisenyi. Le massacre s'est déroulé vers 1 h 30. Originaires de l'est de l'ex-Zaïre, les victimes avaient fui leur pays et les combats qui y opposaient Hutus et Tutsis, en 1995 et 1996. Le gouvernement rwandais accuse des groupes armés hutus d'être responsables du massacre.
dimanche 24 août
La mission d'enquête de l'ONU sur les massacres dans l'est de l'ex-Zaïre est arrivée à Kinshasa.
jeudi 28 août
Le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, a rejeté les « nouvelles conditions » posées par le président Kabila pour la poursuite d'une mission des Nations unies, pour enquêter sur des massacres présumés dans l'ex-Zaïre. Il a demandé à son émissaire, Mohamed Sahnoun, de se rendre immédiatement sur place.
samedi 30 août
Le gouvernement récuse le chef de la mission d'enquête sur les massacres présumés de Hutus dans l'est de l'ex-Zaïre, le Togolais Atsu Kaffi Amega, et refusé d'accorder les visas aux six officiers des Nations unies qui devraient assurer la sécurité des membres de la délégation. Pour soutenir le gouvernement, près de 5 000 personnes ont organisé une marche de soutien et déposé des lettres de protestation auprès des ambassades des Etats-Unis, de la Belgique et de la France qu'elles accusent de manipuler les Nations unies afin de salir l'image du nouveau régime « avec cette histoire de prétendus réfugiés hutus massacrés par les hommes de Kabila ».
vendredi 5 septembre
Plus de 2 000 personnes ont été tuées depuis juillet dans l'est de l'ex-Zaïre lors d'affrontements entre militaires et combattants maï-maï issus de différents groupes ethniques, a annoncé à Kinshasa, l'Association de défense des droits de l'homme (AZADHO). Les affrontements, qui ont fait 2 162 morts, ont eu lieu dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, frontalières de l'Ouganda, du Rwanda et du Burundi. La nomination à la tête des administrations locales de personnalités d'ethnie tutsie a servi de détonateur à cette flambée de violences.
dimanche 7 septembre
Mobutu Sese Seko, soixante-six ans, est mort dans la soirée à l'hôpital militaire de Rabat (Maroc), des suites d'un cancer de la prostate. Le gouvernement de Kinshasa ne semble pas opposé au fait que l'ancien président zaïrois soit inhumé chez lui, dans le nord de l'ex-Zaïre.
lundi 8 septembre
La République démocratique du Congo (ex-Zaïre) devient le treizième Etat membre de la Communauté de développement de l’Afrique Australe (CDAA ; en anglais Southern African Development Community, SADC).
mercredi 10 septembre
Les services de sécurité congolais ont arrêté à Kisangani un ressortissant français, Jean-Marie Bergesion, installé de longue date dans l'est de l'ex-Zaïre. La raison de cette arrestation, qui intervient en même temps que celle d'un Belge, n'a pas été révélée.
jeudi 11 septembre
Le HCR a décidé de suspendre son aide aux Rwandais présents dans l'ex-Zaïre, en raison de l'absence de garanties de sécurité. Une décision qui aurait, dit-on, soulagé Kabila, l'homme qui renversa Mobutu...
mardi 16 septembre
Le gouvernement de la République démocratique du Congo a interdit à la commission d'enquête des Nations unies de se rendre dans la région de MBandaka, dans le nord-ouest, où des violations graves des droits de l'homme lui ont été signalées. Elle était chargée d'y vérifier des massacres présumés de réfugiés rwandais.
mercredi 17 septembre
La ville de Masisi, au nord-ouest de Goma, a été ravagée, il y a un mois, par une attaque massive. Les autorités annoncent quarante-huit morts, mais des témoins parlent de centaines de victimes. Les habitations du centre-ville ont été brûlées et certains bâtiments publics, dont l'hôpital et l'école, endommagés, selon des employés d'organisations humanitaires. Le massacre aurait été commis par des troupes tutsies congolaises ou rwandaises, présentes dans la région depuis le début de la rébellion de Kabila, il y a un an. Il s'agirait de représailles après l'agression de soldats tutsis, quelques jours auparavant, par des combattants « Maï-Maï », des anciens alliés de Kabila.
jeudi 25 septembre
Un membre de la garde du ministre de la Santé a ouvert le feu contre un groupe d'écoliers qui manifestaient devant la résidence du ministre, tuant deux de ceux-ci. Il a été immédiatement jugé par un tribunal militaire qui l'a condamné à mort.
A Kinshasa, la chambre de commerce franco-congolaise a été mise sous scellés par la Cour suprême de Justice de la nouvelle République démocratique du Congo qui revendique le bâtiment. La chambre de commerce franco-zaïroise s'y était installée en 1993, après avoir supporté les frais de réhabilitation de l'édifice : 3,2 millions de francs, pris en charge par le ministère français de la Coopération et la chambre de commerce et d'industrie de Paris.
A Ouagadougou, la salle des congrès de l’UEMOA accueille le tirage au sort de la 21e Coupe d’Afrique des Nations de football, qui sera organisée par le Burkina-Faso du 7 au 28 février 1998. Le groupe B comprend le Ghana, la République démocratique du Congo, le Togo et la Tunisie.
lundi 29 septembre
Des obus tirés de Brazzaville sont tombés sur une caserne de Kinshasa, de l'autre côté du fleuve Congo, faisant 17 victimes. Les factions congolaises rivales se sont mutuellement rejetées la responsabilité de ces dérapages.
mercredi 1er octobre
Laurent-Désiré Kabila, le président de l'ex-Zaïre, et Pascal Lissouba, président du Congo, ont décidé de déployer à Brazzaville des soldats de l'ex-Zaïre pour mettre fins aux tirs d'obus de Brazzaville vers Kinshasa. Ces tirs ont tué officiellement vingt-et-une personnes à Kinshasa depuis trois jours.
jeudi 2 octobre
Kofi Annan, secrétaire général de l'ONU rappelle à New York les trois enquêteurs sur les massacres de réfugiés dans l'ex-Zaïre, qui se trouvent actuellement à Kinshasa. Leur travail est régulièrement bloqué par les autorités congolaises. Kofi Annan aurait donné deux semaines à Kabila pour clarifier sa position. Un membre de l'organisation américain Human rights watch, Scott Campbell, qui vient d'effectuer une visite de quatre semaines dans l'ex-Zaïre, affirme de son côté que le nouveau régime est en train de détruire à grande vitesse les preuves de massacres. Par ailleurs, comme prévu, un détachement d'observateurs militaires de l'ex-Zaïre a débarqué à Brazzaville. Il est chargé de « créer un corridor de sécurité » entre les deux capitales. Ce détachement pourrait se transformer en « composante de la force africaine d'interposition », a précisé le Premier ministre congolais Bernard Kolélas. Pour leur part, les adversaires du président Lissouba, les amis de l'ancien président congolais Sassou N'guesso, dénoncent ce déploiement des ex-Zaïrois, qui constitue, disent-ils, une « implication directe de la RDC dans le conflit au Congo-Brazzaville ». D'où une pression grandissante de la France sur Sassou N'guesso pour qu'il accepte le cessez-le-feu élaboré par le comité de médiation dirigé par le président gabonais Omar Bongo.
vendredi 3 octobre
Kinshasa a décidé, dans la soirée, d'expulser toutes les organisations humanitaires de la région de Goma, dans l'est du pays, et de fermer sa frontière avec le Rwanda.
mercredi 8 octobre
La Fédération internationale des droits de l'homme et l'observatoire Human Right Watch affirment détenir « la preuve matérielle irréfutable » de massacres commis dans l'ex-Zaïre par les troupes de Kabila et leurs alliés. Des témoins oculaires accusent notamment des militaires rwandais. Les deux organisations ont remis leurs preuves à l'ONU. Par ailleurs, de violents combats ont éclaté, dans la matinée, autour de l'aéroport de Gisenyi (nord-ouest du Rwanda) entre l'armée patriotique rwandaise et les milices hutues « interhamwe ». Selon diverses sources occidentales, les autorités de l'ex-Zaïre auraient réquisitionné des véhicules à Goma, de l'autre côté de la frontière, une « forte présence militaire » étant signalée sur la route qui va du centre de la ville à l'aéroport.
jeudi 9 octobre
Les Américains connaissaient les plans du Rwanda pour attaquer des camps de réfugiés hutus dans l'est de l'ex-Zaïre, lors de l'offensive de Kabila. C'est ce qu'affirment Human Right Watch et la Fédération internationale des droits de l'homme. Elles détiennent la « preuve irréfutable » de massacres commis par les soldats de Kabila et ses alliés rwandais, soutenus par les Etats-Unis.
samedi 25 octobre
Kabila a fini par céder aux pressions internationales : après des semaines de tergiversations, il autorise une mission de l'ONU à enquêter sur les massacres de réfugiés rwandais. Un accord signé, grâce à l'intervention directe des Etats-Unis, permet à cette mission d'intervenir « librement dans différentes zones » de son choix. Quelques heures plus tard, cependant, Kabila a menacé de « ne pas coopérer avec la mission » si la communauté internationale continue d'insister pour « lier son aide à cette enquête ».
mardi 11 novembre
La mission d'enquête des Nations unies sur les accusations de massacres de réfugiés rwandais dans l'ex-Zaïre est attendue dans la soirée à Kinshasa. Elle doit reprendre le contact avec le régime de Kabila. Soumis à une forte pression internationale, le gouvernement de la République démocratique du Congo s'est engagé, enfin, à garantir la liberté de mouvement des enquêteurs.
dimanche 16 novembre
Les médias officiels de l'ex-Zaïre ont annoncé le retrait de la République démocratique du Congo de la francophonie (alors que le sommet de la francophonie se tient au Vietnam) et le ministre de l'Information a confirmé cette décision.
mardi 18 novembre
La mission de l'ONU d'enquête sur les massacres dans l'est du pays attend toujours d'être autorisée à travailler. Après avoir essuyé de nombreux contretemps au fil des semaines, elle avait enfin obtenu une rencontre avec le gouvernement pour décider de l'organisation de l'enquête et du départ de ses membres sur le terrain, mais l'entrevue a finalement été reportée et les autorités congolaises n'ont pas fixé de nouvelle date.
mercredi 19 novembre
Kabila a semé la confusion en affirmant, lors d'une conférence de presse, que son pays « n'a pas quitté la francophonie jusqu'à maintenant », ajoutant : « Je pense que la France est une amie du Congo parce que le Congo n'a jamais fait de mal à la France ». Il aurait fini par céder aux réticences des milieux intellectuels, inquiets d'une rupture de la coopération avec la Francophonie.
nuit du jeudi 27 au vendredi 28 novembre
Des tirs ont retenti dans Kinshasa.
vendredi 28 novembre
Des fusillades nourries entre militaires ont fait au moins onze morts dans le quartier de la présidence, à Kinshasa. Deux civils figurent parmi les victimes. Ces incidents confirment les rivalités et le climat de nervosité au sein des forces de sécurité, partagées en « Katangais », venus du sud du pays, et « Rwandais », généralement des Tutsis originaires de la zone frontalière du Kivu.
samedi 29 novembre
Le premier conseiller de l'ambassade de France à Kinshasa a été déclaré indésirable par les autorités, qui l'ont expulsé. Plusieurs journaux proches du pouvoir ont accusé Eric Lubin d'être un « espion », entretenant des relations avec les chefs de l'ancienne armée de Mobutu pour « renverser » Kabila.
lundi 1er décembre
La France a demandé au premier conseiller de l'ambassade de l'ex-Zaïre à Paris de faire ses valises avant la fin de la semaine. Le gouvernement de Kabila soupçonne la France de vouloir « déstabiliser » le régime. Paris estime qu'une « normalisation des relations entre les deux pays passe par la possibilité, pour les émissaires de l'ONU, de mener sans entraves leur enquête sur les massacres de civils lors de la prise du pouvoir par les troupes de Kabila ».
jeudi 4 décembre
La Commission européenne a débloqué une aide globale de 566 millions de francs pour la République démocratique du Congo. Il s'agit d'un premier pas vers la reprise complète de l'aide de l'Union européenne qui avait été interrompue en 1992, du temps du régime de Mobutu.
vendredi 5 décembre
La conférence des « amis du Congo », qui a réuni vingt-six pays et organisations internationales à Bruxelles, a décidé de créer un fonds de soutien financier à la remise en marche de la République démocratique du Congo. Le gouvernement de Kabila s'est engagé, lui, à respecter les droits de l'homme et à construire « une démocratie basée sur des élections libres et équitables ».
lundi 8 décembre
La mission d'enquête des Nations unies sur les accusations de massacres en République démocratique du Congo (ex-Zaïre) a enfin été autorisée à se rendre dans le nord-ouest du pays. Elle a quitté Kinshasa pour se rendre à Mbandaka, où elle doit commencer ses investigations.
mercredi 10 décembre
Les rebelles hutus rwandais (Interhamwe et FAR), qui avaient déjà attaqué le camp de réfugiés zaïrois (17 000 Tutsis de Masisi, au nord-est de l'ex-Zaïre, de Mudende, au Rwanda, en août, y sont revenus dans la soirée. Le massacre, qui constitue un défi au gouvernement de Kigali, a fait 271 morts officiellement (plus de 1 000 selon plusieurs autres témoignages) et autant de blessés. Les assaillants venaient de la ville de Kanama et de la frontière de l'ex-Zaïre. Les rebelles demandent aux Tutsis de quitter « toutes les villes du Rwanda, avant qu'il ne soit trop tard... »
jeudi 11 décembre
La radio de Kinshasa a émis un communiqué du gouvernement de l'ex-Zaïre parlant de « l'agression » menée par « une bande armée, à partir du Rwanda, contre Bukavu, dans l'est du pays. Selon ce même communiqué, les troupes congolaises ont « administré une riposte vigoureuse à cette bande qui a battu en retraite ». Aucun bilan n'a été diffusé.
vendredi 12 décembre
Madeleine Albright, le secrétaire d'Etat américain, a promis une aide de trente-cinq à quarante millions de dollars (210 à 240 millions de francs) pour la reconstruction et la démocratisation de l'ex-Zaïre. Lors d'une conférence de presse conjointe avec le président Kabila, elle a cependant précisé que cette aide serait soumise à l'approbation du Congrès américain, qui « s'intéresse de près à la manière dont le président Kabila respecte ses obligations en matière des droits de l'homme et de démocratie ».
mardi 16 décembre
Les inspecteurs de l'ONU chargés d'enquêter sur les massacres de réfugiés hutus rwandais, qui avaient pu commencer leurs investigations à Mbandaka (nord-ouest) ont du quitter la ville pour regagner Kinshasa, en raison de l'hostilité de la population. L'ONU ignore si l'équipe pourra un jour reprendre son travail.
samedi 27 décembre
L'organisation non-gouvernementale belge Memisa a fait état de dizaines de morts dans l'est du Congo où 20 000 personnes fuient une crue du fleuve Congo. Les médecins craignent une épidémie de dysenterie et de choléra.
Le Zaïre devient membre de l’Organisation mondiale du Commerce et de l’Organisation mondiale du travail.
mardi 7 janvier
Selon le journal français Le Monde, l'armée régulière zaïroise utiliserait plusieurs anciens militaires français pour recruter deux à trois cents mercenaires européens, sud-africains, angolais et mozambicains, en vue de reprendre les territoires pris par les rebelles dans l'est du pays. Le quotidien évoque notamment un ancien responsable du groupe de sécurité de la Présidence de la République française (entre 1981 et 1995) et un ancien gendarme qui aurait été un proche de la cellule antiterroriste de la présidence français. Le ministère français de la Défense a démenti « toute implication de la France dans ce type d'affaire ».
mercredi 8 janvier
Le gouvernement zaïrois a refusé aux agences de l'ONU l'autorisation de procéder au rapatriement de plus de 180 000 réfugiés vers le Rwanda, au motif que cette opération gênerait les mouvements des troupes gouvernementales qui ont reçu l'ordre de reprendre l'est du Zaïre aux rebelles tutsis.
jeudi 9 janvier
Le président Mobutu est de retour en France.
mardi 14 janvier
Selon Médecins sans frontières, la situation est « catastrophique » dans les camps de réfugiés rwandais de Tingi Tingi et d'Amissi, près de Lubutu, dans l'est du Zaïre. Cent mille personnes y connaissent des conditions de vie épouvantables et il y a plus de vingt décès par jour, surtout des enfants. D'après MSF, ces camps sont sous la coupe des anciennes autorités rwandaises et de leurs milices.
du mercredi 15 au jeudi 16 janvier
Les combats entre les rebelles zaïrois et les forces zaïroises qui tentent de reprendre le Kivu ont fait soixante morts dans la région de Lubutu (nord-ouest de Goma). Le numéro deux des rebelles, le commandant Ngandu Kisase, a été blessé lors d'une embuscade. Des offensives de l'armée zaïroise se déroulent aussi à l'ouest de Bukavu.
lundi 20 janvier
Le Premier ministre zaïrois a donné l'ordre, dans la soirée, aux forces armées zaïroises de « conduire la guerre » pour reconquérir le Kivu envahi en octobre par les banyamulenge (Tutsis originaires du Rwanda). 500 000 réfugiés hutus et déplacés zaïrois errent toujours dans la région.
mardi 21 janvier
Quatorze militaires zaïrois, parmi lesquels quatre officiers, ont été condamnés à mort pour « lâcheté » à Kisangani. Il s'agit de gendarmes qui avaient fui devant les rebelles banyamulenge, le 13 janvier, alors qu'ils étaient censés défendre une position à l'ouest de Goma. Ils doivent être rejugés demain en appel.
L'ambassadeur du Zaïre en France, Ramazani Baya, qui avait tué deux enfants au volant de sa voiture en novembre dernier, a démissionné ses fonctions. Une décision acceptée par le président Mobutu. Baya pourra désormais être jugé en France.
mercredi 22 janvier
Une centaine de militaires zaïrois, blessés lors d'affrontements avec les rebelles, ont été accueillies à l'hôpital de Kisangani (capitale du Haut-Zaïre) depuis deux semaines. Tous ces militaires, généralement touchés par des éclats de mortier, se sont affrontés avec les rebelles de part et d'autre de la rivière Rosso sur la route de Walikale, à quatre-vingt kilomètres de Lubutu. Selon des témoignages, une trentaine de militaires zaïrois auraient péri.
Le diplomate algérien Mohamed Sahnoun a été nommé représentant spécial de l'ONU et l'Organisation de l'unité africaine (OUA) pour la région des Grands Lacs d'Afrique (Zaïre, Rwanda, Burundi, Ouganda, Tanzanie et Kenya).
jeudi 23 janvier
Les violents combats qui se déroulent dans le nord Kivu ont fait, selon un communiqué du ministère zaïrois de la Défense, plus de cent tués « chez l'ennemi », parmi lesquels « un grand chef rebelle ». Le communiqué affirme en outre que « l'ennemi est puissamment renforcé par des troupes régulières des pays qui l'appuient ». Le ministère de la Défense zaïrois a aussi annoncé la reprise de la ville de Walikalé, après deux jours de combats. Selon d'autres sources, l'armée zaïroise bénéficie du soutien de quelque 280 mercenaires étrangers, dirigés par le Belge Christian Tavernier. La France a aussitôt condamné une telle présence, soulignant son strict respect de l'embargo européen sur les armes à destination du Zaïre.
du samedi 25 au dimanche 26 janvier
Plusieurs camions portant des plaques d'immatriculation ougandaises et chargés de soldats sont entrés dans l'est du Zaïre, à hauteur de Rutshuru (soixante kilomètres au nord de Goma).
dimanche 26 janvier
Le gouvernement zaïrois a rejeté « toute idée de dialogue avec les rebelles », et réaffirmé sa « détermination » à récupérer les territoires qu'ils occupent dans l'est du pays. Le gouvernement a de nouveau accusé le Rwanda et l'Ouganda d'être « aux cotés des rebelles qui utilisent les enfants comme boucliers humains ». Des centaines de milliers de réfugiés sont abandonnés à eux-mêmes au milieu des affrontements.
mardi 28 janvier
Bien qu'elle semble marquer le pas, la contre-offensive de l'armée zaïroise dans l'est du Zaïre et la présence dans la région de 280 mercenaires blancs (français et belges, mais aussi russes, « serbes et croates ») dotés d'hélicoptères de combat a jeté sur les routes des milliers de Zaïrois. Ils fuient vers l'ouest et les camps de secours surpeuplés de Tingi Tingi, d'Amisa et de Shabunda (200 000 réfugiés à eux trois). Le choléra y tue une dizaine d'enfants par jour. L'armée zaïroise s'est arrêtée à une centaine de kilomètres à l'ouest de Walikalé, où passe la ligne de front. Elle attend des munitions. De son côté, dans une interview au Soir de Bruxelles, le mercenaire belge Christian Tavernier, assure que ses 280 hommes n'ont « pas encore tiré un seul coup de fusil ». Mais il invite le Rwanda à quitter la Zaïre s'il veut épargner une attaque « en profondeur ».
mercredi 29 janvier
La Belgique a dénoncé la présence de milliers de troupes rwandaises sur le territoire zaïrois. Un responsable rwandais a démenti catégoriquement ces informations.
jeudi 30 janvier
Les autorités zaïroises ont appelé la communauté internationale à « agir face à l'agression prouvée » des troupes étrangères. La rébellion zaïroises reconnait avoir « des relations très amicales » avec l'Ouganda et le Rwanda, tout en affirmant ne recevoir aucune aide militaire de ces pays.
vendredi 31 janvier
Pour gêner la contre-offensive zaïroise, les rebelles qui tiennent la région du Kivu ont ouvert plusieurs fronts. Selon leur chef, Laurent-Désiré Kabila, 8 000 hommes se battraient sur ces différents fronts. Les combats ont obligé les organisations humanitaires à suspendre leurs activités et les avions humanitaires venant d'Ouganda ne peuvent plus atterrir à Kisangani.
lundi 3 février
Le port de Kalémie sur le lac Tanganyika est « tombé » aux mains des rebelles. Leur chef, Laurent Désiré Kabila a lancé un ultimatum aux autorités zaïroises, leur donnant jusqu'au 21 février pour « commencer les négociations ». Par ailleurs, le président Mobutu a entamé une visite de trois jours à Rabat au cours duquel il s'entretiendra avec le roi Hassan II du Maroc. Ils passeront en revue « les problèmes du Zaïre et évoqueront les différents moyens de les résoudre ».
mardi 4 février
Loin de reprendre pied au Kivu, l'armée zaïroise est aux abois face aux rebelles qui ont conquis Kalémie et s'enfonce dans la province du Shaba, aussi riche que turbulente. L'armée de Mobutu vient de lancer une vaste opération de recrutement et a obtenu l'aide du Maroc. Elle affirme être confrontée à des armées très organisées, sous-entendu le Rwanda, le Burundi et l'Ouganda. La situation des 400 000 réfugiés s'aggravent : ils meurent au rythme de plus de 200 par semaine. Les Etats-Unis ont confirmé la présence de troupes étrangères sur le territoire zaïrois.
mercredi 5 février
Le chef de la Rébellion Kabila a affirmé que ses troupes progressaient sur tous les fronts dans l'est du Zaïre. Kinshasa continue à rejeter tout dialogue avec le dirigeant rebelle, le qualifiant de « traitre ». Les 40 000 réfugiés rwandais de Shabunda ont fui leur camp devant l'avance des rebelles. Selon des témoignages disponibles en juin 1997, un terrible massacre aurait eu lieu à quelques kilomètres au nord de Shabunda : des centaines de femmes et d'enfants ont péri, jetés par leurs maris ou leurs pères du haut d'un pont surplombant la rivière Ulundi. Apparemment, ces hommes auraient préféré ce geste de désespoir plutôt que de voir les leurs tomber aux mains des soldats rwandais.
jeudi 6 février
La France a déclaré partager la position des Etats-Unis qui ont averti l'Ouganda, le Rwanda et le Burundi de ne pas intervenir dans l'est du Zaïre. Les rebelles poursuivent leur avancée : ils se sont emparés de Punia (ville importante à 300 kilomètres au sud de Kisangani) et de Shabunda. Kabila a fait parader dans les rues de Goma 5 000 jeunes recrues.
vendredi 7 février
Kinshasa a annoncé que la localité de Watsa, proche de la frontière de l'Ouganda, avait été reconquise il y a huit jours et que 800 rebelles y ont été tués. Shabunda aurait aussi été reprise. Il reste que l'offensive rebelle continue et qu'elle a beaucoup progressé ces trois derniers jours, provoquant un immense mouvement de panique dans les camps de réfugiés. D'autant plus grand qu'ils abritent surtout des Hutus rwandais et burundais, toutes gens avec lesquels Kabila a des comptes à régler. Sadko Okada, le Haut commissaire des Nations unies aux réfugiés estime que ces Hutus étaient encore plus de 560 000 au Zaïre. Confrontées sur le terrain à une tension croissante et parfois menacées de mort, les organisations humanitaires internationales (PAM, MSF, ACF,...) ont décidé de rappeler à Kisangani, où la situation n'est pas sûre, tout leur personnel en mission à Tingi-Tingi.
dimanche 9 février
Laurent-Désiré Kabila a promis à Mme Sadako Ogata, Haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés de ne pas attaquer le camp de réfugiés de Tingi-Tingi où s'entassent près de 160 000 personnes. Son objectif, c'est Kisangani (ex-Stanleyville), au nord-est du camp de réfugiés.
jeudi 13 février
La rébellion a annoncé qu'elle avait pris le contrôle d'une nouvelle ville, Faradje, dans l'extrême nord-est du pays, à la frontière soudanaise. Si le fait est confirmé, cette prise serait cruciale, dans la mesure où elle permet de contrôler la région que traversent les Hutus rwandais pour regagner les camps d'entrainement au Soudan.
samedi 15 février
Le chef des rebelles zaïrois, L.D. Kabila a averti la communauté internationale qu'il attaquerait « dans les trois jours » le camp de réfugiés de Tingi-Tingi (130 000 personnes), si l'on n'en faisait pas sortir les anciens combattants hutus qui y ont trouvé refuge et qui se prépareraient à combattre aux côtés de l'armée zaïroise.
lundi 17 février
Trois avions des forces armées zaïroises ont bombardé pour la première fois la ville de Bukavu, contrôlée par les rebelles Banyamulenge. Le marché a été particulièrement touché. Un premier bilan fait état de six morts et trente-sept blessés. Un responsable de la rébellion estime que c'était Kabila qui était visé. L'aviation zaïroise a aussi bombardé les localités de Walikale et Shabunda (huit morts et des dizaines de blessés sur le marché).
mardi 18 février
L'aviation zaïroise a repris ses bombardements contre trois villes de l'est du pays : Bukavu, Shabunda et Walikale. A Bukavu, l'intervention des avions zaïrois, de petits chasseurs-bombardiers Marchetti-Aermacchi, pilotés par des mercenaires serbes, assure-t-on de source informée à Kisangani, a semé la panique dans la population qui cherche à quitter la ville. Et la colère de Kabila : le chef des rebelles a menacé de répliquer à ces « actions terroristes » en allant attaquer la base aérienne de Kisangani. D'autre part, l'armée zaïroise avance vers l'est. Elle affirme avoir repris les positions perdues il y a dix jours, notamment Bafwasende. L'inconnue, c'est la situation au nord. La garnison d'Isiro est tombée la semaine dernière et l'état-major craint que les rebelles tutsis n'en profitent pour contourner Kisangani et marcher sur Gbadolite, à l'ouest, où se trouve la résidence du président Mobutu, quand il est au Zaïre. Signe de la gravité de la situation : pour la première fois depuis des années, les soldats zaïrois ont été payés normalement. Chaque soldat a reçu 100 FF ; les gradés davantage. Ces derniers développements ne vont sans doute pas faciliter la tâche des médiateurs internationaux (Kenya, Afrique du Sud, Tanzanie, Cameroun, Congo et Zimbabwe). Ils sont arrivés dans la soirée à Kinshasa, ainsi que le secrétaire général de l'OUA, Mohamed Sahnoun. Ils voudraient convaincre le gouvernement zaïrois d'accepter qu'ils rencontrent les rebelles à Nairobi. Le président Mobutu exige d'abord l'évacuation du Kivu par les rebelles. Dans la soirée, le Conseil de sécurité de l'ONU a voté un plan de paix en cinq points préparé par Sahnoun. Peu après, le président sud-africain Nelson Mandela a annoncé la rencontre le 20 février en Afrique du Sud du chef des rebelles Kabila et d'un représentant de Kinshasa.
jeudi 20 février
Le Zaïre a décliné l'invitation à un sommet proposée par des Etats africains. Le gouvernement zaïrois exige au préalable le retrait des forces étrangères qu'il accuse d'avoir envahi son territoire. Selon le ministère des Affaires étrangères sud-africain, des représentants du gouvernement zaïrois (Honoré Ngbanda) et de la rébellion ont entamé séparément, au Cap (Afrique du Sud), des discussions avec des responsables sud-africain et américain pour préparer un éventuel face-à-face zaïro-zaïrois.
samedi 22 février
Les rebelles tutsis se sont emparés de Kalima, dans le calme, sans avoir eu à affronter l'armée, une fois de plus invisible. Le camp des 25 000 réfugiés de la ville avait été complètement vidé. Apparemment incapables de stopper la progression des rebelles au sol, les FAZ semblent miser sur leur supériorité aérienne depuis Kisangani, où elles ont établi le QG de leur « contre-offensive foudroyante ».
mardi 25 février
Un témoin occidental affirme dans un rapport remis au Conseil de sécurité des Nations unies que les rebelles Tutsis de Kabila ont massacré des réfugiés hutus dans l'est du Zaïre. Ce document confirme l'existence de charniers dans la région de Katalé. « Au moins 400 000 réfugiés rwandais manquent à l'appel » affirme ce rapport. A Goma, un recensement des victimes a également pu être effectué : 2 743 corps ont été ramassés, principalement ceux de civils originaires de cette ville. Le président sud-africain Nelson Mandela a fait état, au Cap, de « beaucoup de progrès » dans les discussions de paix. Laurent Désiré Kabila est d'ailleurs arrivé en Afrique du Sud pour participer aux entretiens. Par ailleurs, le conseiller spécial de Mobutu, Honoré Ngbanda Nzambo, a rappelé « la condition sine qua non à toute négociation » : le retrait des troupes étrangères du Zaïre, y compris les mercenaires des deux côtés. Sur le terrain, les rebelles banyamulenge continuent à avancer dans deux directions : d'une part, vers Kisangani (ils en sont à deux cents kilomètres ; plus au sud vers Kindu (ils en sont à quarante kilomètres). Mais ce qui fait le plus peur aux populations, ce n'est pas tant l'avancée des rebelles que les départ des FAZ. Impayées, mal équipées et livrées à elles-mêmes, elles pillent systématiquement les villes dont elles se retirent. Dans la soirée, les FAZ auraient tendu une embuscade aux rebelles qui auraient perdu plusieurs centaines d'hommes et auraient été contraints de se replier vers l'Est.
mercredi 26 février
Malgré la débandade de l'armée zaïroise, les moyens de la Rébellion au Kivu ne sont pas illimités. Tout l'art de Kabila est alors de faire croire à une invasion du pays pour obliger Mobutu à négocier. Le président sud-africain Nelson Mandela a reçu Kabila et un émissaire du président Mobutu dans la soirée.
jeudi 27 février
Le gouvernement zaïrois et les rebelles ont reconnu séparément la nécessité de s'asseoir autour d'une table de négociation. Un sommet extraordinaire réunissant dix-sept chefs d'Etat africains aura lieu les 18 et 19 mars, soit à Lomé (Togo), Abuja (Nigéria) ou Addis Abeba (Ethiopie). Selon des sources de l'ONU, les rebelles sont entrés dans Kindu. L'armée zaïroise aurait pillé la ville avant de prendre la fuite. Des informations aussitôt démenties par Kinshasa.
vendredi 28 février
Selon des sources proches de l'organisation onusienne Pam, des réfugiés rwandais ont commencé à quitter le camp de Tingi Tingi, qui abriterait quelque 120 000 personnes près de Lubutu. La rébellion a en effet annoncé qu'elle était prête à intervenir pour, a-t-elle déclaré, « libérer » les réfugiés « otages » des ex-FAR (Forces armées rwandaises) et des miliciens hutus (Interhamwes). L'OUA a annoncé un sommet extraordinaire sur le Zaïre, le 26 mars, à Lomé. Le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a relancé l'idée de l'envoi dans la région d'une force multinationale.
dimanche 2 mars
Kabila a annoncé la « chute totale » de Kindu ainsi que la prise des camps de Tingi Tingi et de la ville proche de Lubutu. A Kindu, la Croix-Rouge a dénombré trois morts civils - des enfants - et dix ou onze tués parmi les extrémistes hutus réfugiés au Zaïre, et qui opposent davantage de résistance aux rebelles que les FAZ. Selon Kabila, ses soldats ne seraient plus qu'à vingt-trois kilomètres de Kisangani (vers laquelle marcheraient les réfugiés de Tingi Tingi). Kabila a également révélé avoir rejeté un projet de cessez-le-feu présenté par les Américains et les Sud-Africains. Il exige un engagement écrit de Mobutu (qui se trouve toujours en France) avant toute négociation.
mardi 4 mars
Une centaine de rebelles ont été repérés à une quarantaine de kilomètres au nord de Kisangani, près de Bangamisa. Le porte-parole de la rébellion a annoncé la chute de Manono (ville minière du Shaba). Comme souvent, la ville serait tombée sans combat, après la fuite des forces gouvernementales. Face à cette situation catastrophique, le ministre zaïrois des Affaires étrangères a demandé à l'ONU de rendre opérationnel son plan de paix.
mercredi 5 mars
Les Etats-Unis ont demandé à Kabila d'autoriser l'ouverture de « couloirs humanitaires », afin de permettre le passage vers le Rwanda de quelque 200 000 réfugiés. De son côté, le gouvernement zaïrois a annoncé qu'il avait donné l'ordre de quitter le pays à une quarantaine de personnes travaillant pour des organisations humanitaires des Nations unies. Il les rend directement responsables d'une « hécatombe » de 25 000 morts du fait de leur abandon « précipité » du camp de Tingi Tingi, sans fournir la moindre preuve de l'existence d'une telle tragédie.
jeudi 6 mars
Le gouvernement zaïrois a accepté le plan de paix proposé par les Nations unies, mais la rébellion le rejette. « Imposer le cessez-le-feu c'est être contre nous », expliquait Kongolo Mwenze, « ministre » de la Justice de l'Alliance rebelle. Dans la soirée, reconnaissant pour la première fois la présence de rebelles à moins de cent kilomètres de Kisangani, le ministère zaïrois de la Défense a évoqué de violents accrochages ayant fait 114 morts parmi les rebelles à hauteur de Panga.
vendredi 7 mars
L'armée zaïroise a considérablement renforcé la défense de l'aéroport de Kisangani, sur laquelle convergent trois colonnes de rebelles. Des renforts ont été acheminés, y compris des mercenaires, et des explosifs ont été placés le long des pistes, qui ont été un moment interdites au trafic aérien. A Kinshasa, les forces de l'ordre ont dispersé un rassemblement organisé par l'un des principaux partis d'opposition, l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Plusieurs personnes ont été interpellées, dont l'un des dirigeants du mouvement, Adrien Phongo. C'est l'aile radicale de ce parti qui avait appelé à cette « marche pour des négociations quadripartites » sur l'arrêt des combats dans l'est du pays. Son chef, l'ancien Premier ministre Etienne Tshisekedi, tente de s'inviter à d'éventuels pourparlers entre Mobutu et Kabila.
lundi 10 mars
Kabila a été accueilli comme un sauveur à Kindu. Cette visite traduit l'assurance croissante de la rébellion qui ne craint même plus les attaques aériennes des forces gouvernementales et qui a annoncé la chute du port de Moba, le dernier que tenait encore l'armée zaïroise sur le lac Tanganyika. Le fils du président Mobutu a annoncé que son père pourrait regagner son pays cette semaine. Par ailleurs, la France envisage la création d'un mini-pont aérien humanitaire pour venir en aide aux réfugiés d'Ubundu qui fuient l'avance des rebelles. Dans la soirée, Kabila a annonce que des « combats » ont éclaté près de Kisangani et que beaucoup d'accrochages étaient signalés aux abords de cette ville. A l'entendre, certains de ses hommes auraient réussi à s'infiltrer dans le dernier fief des forces gouvernementales avec comme mission immédiate d'« observer ». D'après des informations recueillies à Kindu, au moins trois colonnes de rebelles se sont engagées pour la prise de la ville.
mardi 11 mars
Au cours d'un meeting qui a rassemblé 10 000 personnes à Kindu, Kabila a rejeté « l'appel solennel » - le troisième en six mois - lancé le matin même par le président français Chirac pour que la communauté internationale « prenne ses responsabilités » en vue d'obtenir l'arrêt des combats.
mercredi 12 mars
L'armée zaïroise a envoyé des renforts en hommes et en matériel vers la ville de Kindu. Ces renforts visent à contrer une progression éventuelle des rebelles vers les mines de diamants du pays. Les 75 000 à 100 000 réfugiés du camp d'Ubundu, à une centaine de kilomètres au sud-est de Kisangani ont lancé un appel désespéré aux quelques journalistes qui se sont hasardés dans la région. Persuadés que les combattants de l'Alliance des forces démocratiques de Kabila veulent leur mort, les réfugiés rwandais n'ont plus qu'un rêve : franchir le fleuve Zaïre pour se réfugier sur l'autre rive.
du jeudi 13 au vendredi 14 mars
Entre deux et trois cents réfugiés hutus ont péri noyés en essayant de traverser le Zaïre sur de frêles embarcations.
nuit du vendredi 14 au samedi 15 mars
Le maréchal-président Mobutu a été hospitalisé en d'urgence à l'hôpital Princesse Grâce de Monaco.
samedi 15 mars
Les forces rebelles se sont emparées de Kisangani. Kabila ne veut toujours pas entendre parler de trêve. Il veut d'abord engager des négociations avec le régime de Kinshasa. Le cessez-le-feu ne peut intervenir qu'après.
dimanche 16 mars
Les rebelles ont pris Pweto, à la frontière zambienne. Kabila a l'intention de « libérer tout le pays ». Il ira « jusqu'à Kinshasa ».
mardi 18 mars
Kabila a annoncé un cessez-le-feu de sept jours limité à la région de Kisangani, pour permettre de secourir les réfugiés, pendant que son « armée de libération » poursuit sa progression vers Lubumbashi. Kabila a pronostiqué son arrivée à Kinshasa « avant juin ». On prend la menace très au sérieux dans la capitale zaïroise : plusieurs membres de la famille de Mobutu ont traversé le fleuve pour se réfugier à Brazzaville. Dans la soirée, le Parlement, réuni en session extraordinaire, a destitué, bien que les trois quart des parlementaires n'étaient pas présents comme l'exige la constitution, le Premier ministre Léon Kengo Wa Dondo, considéré comme responsable de la déroute des FAZ. Léon Kengo a appris sa destitution à Nairobi (Kenya) où il venait d'arriver pour participer à un mini-sommet africain sur la situation au Zaïre.
mercredi 19 mars
Sur le plan politique aussi, le Zaïre tient avec des bouts de ficelle. L'opposition et Etienne Tshisekedi profitent des revers militaires du pouvoir pour établir des contacts avec la rébellion afin d'« éradiquer ensemble la dictature ». Et surtout, malgré sa destitution, le Premier ministre Kengo continue de représenter officiellement le Zaïre au sommet de Nairobi. A Kinshasa, l'exécutif conteste en effet son éviction. Sur le terrain, alors que Kisangani retrouve une vie normale, Lubumbashi attend l'arrivée du « libérateur ».
jeudi 20 mars
Dans la soirée, de sa villa française, le président Mobutu a appelé « à un cessez-le-feu » et à la création d'« un Conseil national représentant les divers courants et sensibilités ». Il entend même remettre sur les rails le processus de démocratisation prévu depuis des années et qui aurait dû aboutir à la fin de l'année à l'adoption d'une nouvelle Constitution et à des élections générales. Sur le plan militaire, les rebelles ne sont plus qu'à deux cents kilomètres de Lubumbashi et ne trouvent guère de résistance sur leur chemin. A Kisangani, les soldats réguliers de la FAZ, qui s'étaient cachés dans la forêt, se rendent par dizaines. La situation est si tendue que la France, l'Allemagne et la Suisse, après la Belgique et les Etats-Unis, recommandent à leurs ressortissants de quitter provisoirement le pays si leur présence n'est pas indispensable.
vendredi 21 mars
Laurent-Désiré Kabila a été accueilli par une foule en délire à Kisangani ; le maréchal Mobutu est rentré le même jour à Kinshasa sans accueil officiel.
samedi 22 mars
A Kisangani, la rébellion a fait élire les nouvelles autorités administratives du Haut-Zaïre par moins de 10 000 personnes, en recourant à une notion assez floue de « démocratie directe ». Kabila a lui-même annoncé que le premier gouvernement de transition serait formé pour un an, « exclusivement » par l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre. Tous les partis politiques autres que l'Alliance rebelle sont interdits pendant toute la durée de la « guerre de libération ».
dimanche 23 mars
Mobutu a fait sa première apparition publique devant quelques journalistes qu'il a reçu à sa résidence du camp militaire de Tshatshi, dans la banlieue de Kinshasa. Un peu plus tôt, il avait reçu le vice-Président sud-africain, Thabo Mbeki, qui tente toujours d'organiser des pourparlers entre le chef de l'Etat zaïrois et le leader des rebelles, Kabila, qui contrôlent un tiers du pays.
lundi 24 mars
« Si c'est cela le prix de la paix, nous sommes prêts à dialoguer avec Kabila ». C'est ce qu'a déclaré, dans la soirée, Banza Mukalay, vice-Premier ministre zaïrois et vice-président du Mouvement populaire de la révolution (MPR), le parti de Mobutu. Mukalay plaide aussi pour la poursuite du processus démocratique. Et pour preuve de bonne volonté, Mobutu a « pris acte » de la destitution de son Premier ministre Kengo Da Dondo. Le problème c'est que Kabila n'a aucune envie de négocier. Par ailleurs, Brazzaville, la capitale du Congo, située sur la rive en face de Kinshasa, en envahie par les dignitaires zaïrois et leurs familles. Cent marines américains et un bataillon français et cinq cent para-commandos belges y ont aussi débarqué pour couvrir d'éventuelles opérations d'évacuation.
mardi 25 mars
Kabila semble faire une concession, annoncée par le canal du gouvernement sud-africain. Le leader des rebelles qui avait d'abor exigé des négociations directes avec le président Mobutu, accepte maintenant de rencontrée une délégation envoyée par celui-ci. Il impose tout de même des limites à cette rencontre : elle devra avoir lieu ailleurs qu'au Zaïre et elle aura un caractère unique puisque, si elle échoue, il ne sera plus question de négocier... A Kinshasa, Banza Mukalay a admis le principe d'un « partage du pouvoir » avec la rébellion... Par ailleurs, plus de 14 000 réfugiés hutus rwandais sont arrivés à sept kilomètres de Kisangani, où ils tentent de s'organiser tant bien que mal sans la moindre assistance des organisations humanitaires.
mercredi 26 mars
Ouverture du sommet de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) à Lomé. Ce sommet extraordinaire est essentiellement consacré au Zaïre. Pour la première fois, des représentants des rebelles et des autorités zaïroises se sont retrouvés. A Londres, Bizima Karaha, « ministre des Affaires étrangères » de Kabila a rejeté catégoriquement l'idée d'un partage du pouvoir. Ce même jour, à Paris, Nzanga Mobutu, fils et porte-parole du chef d'Etat, réaffirme la position paternelle : « Pas de négociation sans un cessez-le-feu préalable ».
Le Haut commissaire de l’ONU aux réfugiés, Sadako Ogata, a demandé aux rebelles qui contrôlent l’est du Zaïre de laisser des dizaines de milliers de réfugiés rentrer au Rwanda après cinq mois d’une épuisante errance à travers la jungle et la guerre.
jeudi 27 mars
La rébellion et les autorités de Kinshasa se sont engagées à « respecter le principe du cessez-le-feu et le principe de négociations ». C'est ce qu'indique le communiqué final du sommet de Lomé. Par ailleurs, un train du PAM a apporté 120 tonnes de nourriture aux réfugiés qui sont sur la route entre Ubundu et Kisangani. C'est la première aide qu'ils ont reçue depuis un mois.
samedi 29 mars
Un employé du PAM a vu des « centaines de corps » de réfugiés rwandais morts, en survolant la route qui va de Kisangani à Ubundu, 150 kilomètres plus au sud. Quelque 100 000 réfugiés hutus sont disséminés rwandais sont entre ces deux villes : les rebelles refusent de les laisser entrer dans Kisangani et les repoussent vers le sud.
du samedi 29 au dimanche 30 mars
La rébellion s'est emparée de Kasenga, à 216 kilomètres au nord de la capitale du Shaba, et Kamina, un important noeud ferroviaire (400 kilomètres au nord-ouest de Lubumbashi) : la capitale du cuivre est désormais coupée de son lien ferroviaire avec Kinshasa.
dimanche 30 mars
L'Afrique du Sud vient d'annoncer que les autorités de Kinshasa et la rébellion zaïroise ont accepté d'engager le 3 avril des « négociations effectives », quelque part sur le territoire sud-africain. Leur objet : préparer une rencontre entre Mobutu et Kabila, pour définir les modalités de transition. En attentant, la rébellion refuse toujours toute idée de cessez-le-feu. Elle poursuit donc son offensive en direction de Lubumbashi, dont elle prédit la chute « imminente » et d'où commencent à fuir les familles des militaires.
lundi 31 mars
Les rebelles ont chassés les réfugiés hutus qui campaient depuis quelques jours à Lula, à sept kilomètres au sud de Kisangani. Ils ont ordonné à tous les réfugiés de quitter les abords de la ville et de se mettre en route pour Ubundu, 150 kilomètres plus au sud.
mercredi 2 avril
L'opposition a choisi son leader, Etienne Tshisekedi, pour être le nouveau Premier ministre de Mobutu. Mais déjà, la rébellion a rejeté sa nomination. Sur le terrain, le général Mosala, est arrivé à Lubumbashi, la capitale du riche Shaba.
jeudi 3 avril
Tshisekedi propose d'offrir six fauteuils dans le gouvernement qu'il vient de créer à la rébellion de Kabila. Laquelle a aussitôt rejeté l'offre, rappelant que son objectif était le départ du président Mobutu. Et pour compliquer un peu plus les choses, voici que Tshisekedi, soutenu par la France et la Belgique mais froidement accueilli à Kinshasa, juge maintenant que la rencontre de Pretoria (Afrique du Sud) entre rebelles et représentants de Mobutu, n'est pas « utile ». Dans la soirée, les rebelles ont reconnu qu'ils « progressaient lentement » vers Lubumbashi.
vendredi 4 avril
Les rebelles ont pris le contrôle de la capitale zaïroise du diamant, Mbuji Mayi (sud-est). Avant leur arrivée dans la ville, les soldats de l'armée zaïroise se sont livrés à des pillages puis ils se sont enfuis, selon un scénario désormais bien réglé.
samedi 5 avril
Des organisations ont découvert 180 cadavres dans les camps de Kasese et Biaro, qui abritent respectivement 50 000 et 30 000 réfugiés. L'Alliance rebelle de Kabila a donné son feu vert pour utiliser l'aéroport de Kisangani pour rapatrier les réfugiés hutus vers le Rwanda.
dimanche 6 avril
Les véritables négociations inter-zaïroises (Kamanda Wa Kamanda représentant Mobutu, et le Dr Bizima Karaha représentant Kabila) pour mettre fin à six mois de guerre dans l'est du Zaïre ont débuté à Pretoria (Afrique du Sud) dans le secret. A Kinshasa, le président Mobutu a pressé Kabila de négocier « afin de restaurer la paix dans le pays ». A Goma, les rebelles affirment que la prise de Lubumbashi n'est plus qu'une question d'heures.
lundi 7 avril
Les rebelles s'apprêtent à s'emparer sans grande difficulté de Lubumbashi. A l'aube, ils ont pris Kushi, une ville frontalière à trente kilomètres de la capitale du Shaba où de nombreux soldats des forces régulières arborent déjà bandeaux et drapeaux blancs en signe de ralliement à l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo. Une douzaine d'officiers et sous-officiers ont même lancé un appel à déposer les armes et souhaitaient la « bienvenue » aux rebelles. Appel désavoué par le général Molemba, commandant de la région militaire, qui a affirmé « la situation en main ». La principale inconnue reste l'attitude de la Division de la sécurité présidentielle (DPS), une unité d'élite dont les chefs affirment vouloir résister aux troupes de Kabila. Pendant ce temps, les discussions entre les représentants de Mobutu et de Kabila se sont poursuivies à Pretoria, pour la troisième journée consécutive, dans le plus grand secret. A Kinshasa, c'est la confusion la plus totale, le Premier ministre Tshisekedi a rejeté l'Acte constitutionnel de la transition, sur la base duquel il avait été désigné. Il a aussi récusé le Haut conseil de la république/Parlement de transition (HCR-PT). Celui-ci devait se réunir pour débattre d'une éventuelle déposition de Tshisekedi. Mais, il a finalement renoncé à se réunir après que le Premier ministre ait fait manifester ses militants « purs et durs » dans le centre de la capitale. Par ailleurs, 7 000 réfugiés, disparus depuis la prise de Goma par les rebelles, sont arrivés dans un camp au sud de Kisangani, « dans un état catastrophique » et Kabila est arrivé à Mbuji-Mayi.
mardi 8 avril
L'aéroport de Lubumbashi a été fermé au trafic civil. Dans le centre de la ville, les seuls qui osent s'aventurer dehors se pressent devant le supermarché en gros pour acheter des vivres en réserve. Quelques soldats circulent à bord de camionnettes « réquisitionnées » pour l'effort de guerre. Mais il n'y a pas encore eu de pillages de maisons et de magasins, tant redoutée par la population. La résistance de la DPS semble avoir surpris les troupes de Kabila, qui seraient à dix kilomètres. Des obus de mortier ont été tirés pendant près d'une heure au lever du jour, à l'extérieur de la ville, dans le nord et l'ouest. L'armée zaïroise tenterait une contre-offensive sur Kushi. Des renforts gouvernementaux ont été acheminés à Lubumbashi. A Mbuji-Mayi, Kabila a annoncé, devant plusieurs dizaines de milliers de personnes, que ses hommes, déployés sur le front nord, se trouvaient à 260 kilomètres au nord-est de Kinshasa et avaient pris Lisala, ville natale de Mobutu. A Pretoria, les délégations zaïroises ont décidé d'ajourner leurs entretiens sans décider d'un cessez-le-feu. A Kinshasa, plusieurs personnes ont été blessées dans les incidents qui ont éclaté lors des manifestations organisées par les partisans de Tshisekedi. Le président de la Commission du contentieux du parlement de transition, Emmanuel Lusambo, a été grièvement atteint par une pierre jetée par l'un des manifestants.
mercredi 9 avril
Le général Likulia Bolongo a été nommé Premier ministre, en remplacement de Tshisekedi, désavoué par les partis. Sur le terrain, les rebelles ont commencé la prise de Lubumbashi.
jeudi 10 avril
Les troupes rebelles de Kabila ont achevé la prise de Lubumbashi en contrôlant l'aéroport ou 300 FAZ et DPS s'étaient réfugiés : l'ère Mobutu touche à sa fin, d'autant que Américains, Belges, Britanniques et Sud-Africains estiment qu'il doit céder la place. Les habitants de la capitale du Shaba ont accueilli en « libérateurs », par des cris de joie, les rebelles.
dimanche 13 avril
C'est dans la plus grande confusion que le nouveau Premier ministre, le général Likulia Bolongo, a pris ses fonctions. C'est la première fois, depuis 1990, qu'un gouvernement est dirigé par un militaire. Sur le plan militaire, Kabila marque encore des points : ses hommes sont arrivés à la frontière de la Zambie (qui les soutient) et ont conquis les villes de Kananga, capitale du Kasaï occidental, et de Kolwezi (Shaba) où les soldats se sont aussitôt rendus. Kabila affirme par ailleurs que la rébellion se trouve à 300 kilomètres seulement de Kinshasa, et qu'elle y entrerait « bien avant juin ». Sur le plan politique, le rapport de force n'est guère plus favorable à Mobutu. Kabila vient de lui faire une offre directe de rencontre annonçant qu'il va « voyager prochainement » en Afrique du Sud pour « dynamiser les négociations ». Mais Mobutu rejette « l'ultimatum d'un chef de bande », mais « ne refuse pas de parler » au chef de la rébellion. La situation humanitaire est quelque peu occultée par les évènements politiques et militaires. Pourtant, selon le HCR, au moins 600 réfugiés sont morts en une semaine autour de Kisangani où le choléra, la dysenterie et le paludisme menacent 80 000 personnes. Et quarante-six Libanais, à qui les rebelles réclament une rançon de 750 000 dollars chacun (4,5 millions de francs) sont bloqués dans la ville diamantifère de Mbuji-Mayi.
lundi 14 avril
Kabila est arrivé à Lubumbashi où il a été accueilli par des milliers d'habitants manifestant leur joie. Mais pour la première fois depuis le début de sa fulgurante avancée dans l'est du pays, il pourrait être confronté à une situation politique délicate : des jeunes gens de l'Uféri, important parti du Katanga, ont pris à partie, dans la matinée, le nouveau gouverneur intérimaire nommé par l'AFDL, Gaëtan Kakuji, pour connaître la date des futures élections. A Kinshasa (quatre millions d'habitants), la journée « ville-morte » à laquelle l'opposition appelait la population pour pousser le président à quitter le pouvoir, a réussi à paralyser la capitale sans dérapage grave. La garde civile a toutefois tiré en l'air pour disperser des manifestants près de la résidence de Tshisekedi. Quant à Mobutu, il « envisage » maintenant de rencontrer Kabila.
mercredi 16 avril
La panique gagne les Kinois alors que court la rumeur de l'arrivée prochaine des rebelles. Leur chef, Kabila, était chez le Sud-Africain Mandela pour parler avec lui de l'avenir du Zaïre. A Kinshasa, Mobutu s'est trouvé un nouveau bouc émissaire, l'ancien Premier ministre Léon Kengo wa Dengo. Ses compatriotes ne sont pas dupes. Les rebelles sont entrés dans la province de Bandundu, principal grenier de la capitale zaïroise (70 % des denrées alimentaires). Le prix de certains aliments a déjà commencé à grimper rapidement. De leur côté, des militaires s'inquiètent de la présence dans la capitale de dizaines de milliers d'éléments de la DSP et de la garde civile. Ces derniers craignent que les FAZ désertent ou rallient Kabila.
jeudi 17 avril
Vingt-quatre heures après la visite de Kabila au président Mandela, le gouvernement sud-africain a fait savoir qu'il avait invité le chef des rebelles zaïrois et le maréchal Mobutu à se rencontrer rapidement en territoire sud-africain pour trouver une solution au problème du Zaïre. D'après Mandela, Kabila, qui annulé au dernier moment, un meeting à Lubumbashi, « veut une solution qui ait le soutien du président Mobutu ; il ne fera donc rien pour humilier » le maréchal-président. Même opinion du côté des banquiers suisses. Pour Berne, il serait inopportun de geler les avoirs du président zaïrois. D'autre part, les rebelles viennent de conclure avec le géant minier American Minerai Fields un contrat pour reprendre une bonne partie des activités de la Gecamine, la société d'Etat qui exploite le cuivre et le cobalt.
vendredi 18 avril
Devant les difficultés créées par les rebelles zaïrois, le HCR a renoncé à rapatrier vers le Rwanda les dizaines de milliers de Rwandais qui s'entassent près de Kisangani, dans les camps de Kasese 1 et 2. L'explication des rebelles, c'est qu'il y aurait déjà plus de 300 cas de choléra. D'autant plus préoccupant que ses entrepôts, situées dans la gare de chemin de fer, sur la rive gauche du Zaïre, face à Kisangani, ont été pillés par plus de 300 personnes venues en pirogue de l'autre bord et armées de machettes et de bâtons : « quatorze tonnes de farine et trois tonnes de petits pois » ont disparu. Enfin comme un malheur n'arrive jamais seul, le HCR s'est fait délester de 60 000 litres de carburant à Goma par les forces rebelles. Par ailleurs, les pluies torrentielles qui se sont abattues depuis le début de la semaine sur la région de Kisangani ont noyé sous la boue les camps de réfugiés du secteur. Selon la Croix-Rouge, il y aurait au moins dix-huit morts (surtout des enfants, décédés de froid et d'épuisement). A Kinshasa, le maréchal Mobutu a annoncé officiellement qu'il acceptait de rencontrer dans les prochains jours son vieil ennemi Kabila en Afrique du Sud. Pour sa part, la rébellion n'a aucune intention d'assouplir sa position. Bizima Kahara, « ministre » des Affaires étrangères et négociateur de l'Alliance, a maintenu la position intransigeante de Kabila en réaffirmant que Mobutu devait « quitter le pouvoir » et qu'« aucun cessez-le-feu » n'était possible « avant la fin de la guerre ».
samedi 19 avril
Au cours d'un meeting à Lubumbashi, le rebelle Kabila s'est refusé à négocier autre chose que le départ de Mobutu. La guerre doit aller, a-t-il dit, jusqu'à Kinshasa. Ce « libérateur » commence à inquiéter les milieux politiques zaïrois. Ces inquiétudes sont confortées par la suspension des partis dans les territoires qu'il occupe et par la récente mise en résidence surveillée à Goma du numéro un de la compagnie de diamants du Kasai-Oriental, la Miba, et du gouverneur du Shaba (Kabila a nommé à sa place son secrétaire général, Gaëtan Kakuji), deux personnalités qui comptent dans leur région d'origine. De plus, après la prise de la capitale du diamant, Kabila aurait, selon différentes sources, emporté 483 000 carats et détourné toutes les devises trouvées dans les coffres-forts de la compagnie minière à Mbujumyi.
lundi 21 avril
D'importants pillages par la population locale de la région de Kisangani ont provoqué dans la matinée une suspension des activités humanitaires dans les camps de Kasese et Biaro, un peu plus au sud. Ces pillages auraient été provoqués par les meurtres de six Zaïrois, dont les réfugiés ont été accusés.
mardi 22 avril
Le président Mobutu a invoqué son état de santé pour refuser de se rendre en Afrique du Sud, le seul pays où Kabila acceptait de le rencontrer. Mais la santé du président zaïrois est loin d'être le seul obstacle. Mobutu pose toujours comme préalable à toute discussion la proclamation d'un cessez-le-feu et la possibilité de se présenter à des élections. La tension est montée d'un cran dans le fief rebelle de Goma après des tirs d'armes automatiques : « Un malentendu entre soldats », affirme un responsable rebelle.
mercredi 23 avril
Les rebelles ont poursuivi leur progression vers Kinshasa avec la prise de deux nouvelles villes (Ilebo et Tshikapa dans le Kasaï occidental), mais Kabila est, plus que jamais confronté à l'épreuve du pouvoir. De sérieuses divergences semblent voir le jour entre les rebelles et le Rwanda ainsi qu'entre les différentes composantes ethniques de la rébellion. Des affrontements ont opposé les nouvelles recrues venues du Shaba et les Tutsis ramenés par Kabila. Des officiers non-tutsis veulent se « libérer » de la tutelle de ces derniers très présents aux postes de commandement. Par ailleurs, le HCR a de « fortes indications » selon lesquelles les quelque 55 000 réfugiés rwandais du camp de Kasese (près de Kisangani) étaient en train de partir vers le Sud.
jeudi 24 avril
L'inquiétude grandit chaque jour sur le sort des réfugiés de l'est du Zaïre, sous le contrôle de la rébellion. Le secrétaire général de l'Onu accuse les rebelles de laisser les réfugiés mourir de faim en refusant aux organisations humanitaires de leur porter secours et de les rapatrier, comme prévu, par un pont aérien qui aurait du commencer la semaine dernière. Une mission humanitaire, qui s'est rendue sur place, affirme que le camp de Kasese, qui abritait 55 000 réfugiés hutus rwandais, est vide. Soupçonnée de massacres, la rébellion accuse les miliciens hutus rwandais qui se trouvent parmi les réfugiés eux-mêmes.
vendredi 25 avril
Des informations du même ordre que la veille sont parvenues de Biaro, à quarante kilomètres de Kisangani. Le camp qui abritait quelque 30 000 réfugiés rwandais est vide...
samedi 26 avril
Dans la soirée, une vingtaine de rebelles ont enlevés cinquante enfants rwandais et les adultes qui étaient avec eux, dans un hôpital pédiatrique proche de Bukavu. Ils ont battu deux infirmières et une aide-soignante qui tentaient de s'interposer.
dimanche 27 avril
Kabila a annoncé que certains de ses hommes sont infiltrés à Matadi, passage obligé de toutes les importations vers Kinshasa. Dans la capitale, on soutient que l'entourage de Mobutu a déjà préparé son plan afin de prendre la population en otage. Ils sont prêts à se servir des Kinois comme « boucliers », a révélé un sous-officier du ministère de la défense, ajoutant que les officiers proches du maréchal ont juré de ne pas mourir seuls. Des tracts circulent, portant les noms de proches du président et d'officiers bandits (ethnie du maréchal) qui seront exécutés dès que la capitale tombera aux mains de la rébellion. Sortant du mutisme qu'il affichait depuis plusieurs jours à l'égard des médias internationaux, Kabila a donné une conférence de presse à Kisangani. Le leader de la rébellion a annoncé qu'il avait donné au HCR soixante jours pour rapatrier les réfugiés hutus rwandais de la région de Kisangani. Aux accusations de l'ONU, qui parle à mots à peine couverts d'« extermination délibérée », le chef de la rébellion répond que le drame vécu par ces milliers de personnes n'est qu'un « petit problème ». Mais, l'ONU a enfin pu rapatrier trente-trois réfugiés dans un de ses avions, directement de Kisangani vers Kigali. Une douzaine d'autres, trop faibles pour supporter le voyage, sont restés sous sa protection. En outre, grâce à un vol de reconnaissance dans la région, le HCR pense avoir repéré quelques centaines de réfugiés en fuite dans une partie très dense de la forêt.
Qualifications pour la Coupe du monde de football 1998 : à Lomé (Togo), le Zaïre a été battu par l’Afrique du Sud deux buts à un.
lundi 28 avril
Les organisations humanitaires n'ont retrouvé que quelques milliers de réfugiés hutus rwandais non loin de Kisangani. Ils ont regagné le camp de Biaro. Il en manque toujours plus de 80 000. Le silence des rebelles parait de plus en plus coupable. Un soldat rebelle a même avoué que tous les jours, la rébellion « capture les réfugiés rwandais et les tue ». Pendant ce temps, les troupes rebelles continuent à avancer : la ville de Kilwit (300 000 habitants, à 450 kilomètres à l'est de Kinshasa), dernière défense de Kinshasa, est tombée comme un fruit mûr...
mardi 29 avril
Après des semaines de tractations, un sommet Mobutu-Kabila s'annonce. Sur un navire militaire sud-africain, au large de Cabinda (Angola), et « avant la fin de la semaine, si les parties ne changent pas d'avis ». Mais les deux parties ne semblent pas d'accord, pour l'heure, sur l'objet de ce sommet.
jeudi 1er mai
Kabila a promis de tenter de résoudre pacifiquement la crise, tout en déclarant que ses hommes continueront à marcher sur Kinshasa.
vendredi 2 mai
La rencontre à bord de l'Outeniqua, entre Mobutu et Kabila, a été repoussée au lendemain. Seul Mobutu s'est présentait, accompagné de deux de ses enfants, d'une quinzaine de membres de son service de sécurité et de son ministre des Affaires étrangères. Il a été accueilli par le président sud-africain Nelson Mandela. Sur place, la guerre se poursuit : Lisala, le ville natale de Mobutu, après avoir été pillée par les troupes gouvernementales, est tombée aux mains de la rébellion sans offrir la moindre résistance.
dimanche 4 mai
Le président sud-africain Nelson Mandela finissait par désespérer de réunir sur son bateau, l'Outeniqua ancré dans le port congolais de Pointe-Noire, Mobutu et Kabila. Il aura fallu qu'il élève sérieusement le ton pour convaincre l'un et l'autre de se parler. Quatre-vingt-dix minutes de face à face, le premier entre les deux hommes, auront suffi. Kabila, qui contrôle les deux tiers du territoire zaïrois, a donné l'ordre à ses troupes de cesser leur progression sur tous les fronts, sans toutefois véritablement accepter le cessez-le-feu. Mobutu, pour sa part, a proposé la mise en place d'un processus de transition suivi d'élections au Zaïre, auxquelles il ne se présenterait pas. Une autorité de transition organiserait les élections. Cela dit, aucun calendrier n'a encore été fixé. Kabila et Mobutu sont juste convenus de se revoir dans un délai de dix jours. En fait, le chef rebelle voudrait que sa formation, l'AFDL, prenne le pouvoir comme autorité de transition et que Mobutu lui cède la place. « La fin des hostilités sera la conséquence de ce processus », a précisé le communiqué officiel publié dans la soirée. Par ailleurs, comme si la faim et l'épuisement ne suffisaient pas, 91 réfugiés rwandais sont morts écrasés et étouffés, dans la soirée, à bord du train qui devait les ramener du camp de Biaro jusqu'à Kisangani, puis pour s'envoler vers le Rwanda. Depuis le début du pont aérien, le 30 avril, plus de 5 000 réfugiés ont ainsi pu être rapatriés. Aujourd'hui, ils ont été plus de mille à arriver au Rwanda sains et sauf.
lundi 5 mai
Laurent-Désiré Kabila a annoncé que ses troupes continuaient leur progression vers Kinshasa (elles sont à soixante kilomètres de l'aéroport) où elles devraient entrer « dans deux ou trois jours ». Les rebelles ne feront pas de quartier : « on se rend ou on est tué ». Selon divers témoignages, rebelles et forces gouvernementales renforceraient actuellement leurs positions respectives autour de la ville de Kengé, à deux cents kilomètres à l'est de la capitale. Le Premier ministre, Likulia Bolongo, affirme que des parachutistes volontaires associés à la division spéciale présidentielle « forment un verrou » autour de cette dernière ville de la région reliée par la route à Kinshasa. Les rebelles, eux, ont nettement renforcé leurs positions à Kikwit. Des troupes supplémentaires y sont arrivées par avions-cargo. Au nord, les rebelles progresseraient maintenant vers le dernier bastion de Mobutu, Gbadolite, proche de la frontière centrafricaine.
mardi 6 mai
De violents combats opposent, dans la soirée, les troupes gouvernementales aux rebelles autour de Kengé. A Kikwit, au moins cinq cents rebelles auraient été tués, selon un porte-parole du Premier ministre zaïrois. Il affirme que les FAZ sont « en passe de reprendre la ville ». Mais les rebelles affirment le contraire. Dans le même temps, le président Mobutu, à qui le chef rebelle a donné huit jours pour se démettre, a annoncé compter se rendre à Libreville, au Gabon, où il rencontrera quatre de ses homologues d'Afrique centrale. Selon un conseiller, ce déplacement pourrait être une escale avant de rejoindre la France. Signe des temps, les FAZ ont pillé la localité de Gbadolite, où se trouve le palais de Mobutu. Par ailleurs, dans l'après-midi, 271 enfants de Hutus rwandais sont montés dans un gros avion cargo Ilyouchine, qui les a ramenés de Kisangani jusqu'à Kigali. Depuis le début du pont aérien pour le rapatriement des réfugiés rwandais, neuf cents enfants ont été ramenés par avion au Rwanda, où les organisations humanitaires tentent de retrouver leur famille, proche ou éloignée. Quatre-vingts autres enfants sur 230, qui devaient être rapatriés la veille, ont été blessés par balles ou par des coups de machette. Emma Bonino, commissaire européen chargé de l'action humanitaire déclare que l'est du Zaïre « a été transformé en véritable abattoir ».
mercredi 7 mai
Dans leur marche sur Kinshasa, les rebelles se sont heurtées, pour la première fois à une vive résistance des FAZ. Selon des sources rebelles et diplomatiques, les combats font rage à Kenge. Médecins sans frontières fait état de deux cents morts parmi les civils. Parmi les tués figurent dix secouristes de la Croix-Rouge zaïroise.
jeudi 8 mai
De violents combats se poursuivent à Kenge. Des chiffres contradictoires circulent sur les pertes militaires qui semblent élevées de part et d'autre. A Kikwit, des affrontements continuent, des éléments des forces zaïroises isolés, ayant constitué des poches de résistance face aux rebelles qui tiennent la ville. Sur le front du Nord, les troupes de l'Alliance assurent s'être emparées de Bandundu. Parallèlement aux combats, l'activité diplomatique se poursuit sans relâche.
vendredi 9 mai
Le sommet de Libreville, auquel participe Mobutu, invite ce dernier à passer la main et à organiser une transition « ordonnée et démocratique » au Zaïre. Kabila rejette ce scénario et continuer à faire avancer ses troupes : Bandundu est passée sous le contrôle des rebelles. Les combats font toujours rage à Kenge.
samedi 10 mai
L'archevêque de Kisangani, Laurent Monsengwo, a été élu président du Parlement de transition zaïrois. Il pourrait remplacer Mobutu en cas de démission. Kabila a déclaré qu'il ne traiterait pas avec Monsengwo mais qu'il renonçait pour le moment à prendre Kinshasa par les armes. Il a annoncé qu'il était prêt à stopper sa progression, mais pas à adopter un cessez-le-feu. Il a également confirmé qu'il rencontrerait « certainement » le président Mobutu, le 14 mai, à bord d'un navire sud-africain. Pendant ce temps, les affrontements se poursuivent toujours autour de Kenge, et Kabila affirme que ses troupes se trouvent à cinquante kilomètres de Kinshasa.
dimanche 11 mai
Le « ministre » rebelle des Affaires étrangères, Bizima Karaha, a appelé à Lubumbashi les étrangers à quitter Kinshasa. Motif : les forces gouvernementales comptent les tuer pour provoquer une intervention internationale.
lundi 12 mai
L'opposition radicale, proche de Tshisekedi, a emboîté le pas à Kabila pour rejeter l'élection de Mgr Monsengwo à la tête du Parlement de transition zaïrois. Ce parti pris inquiète la population qui craint que l'opposition prenne fait et cause pour la rébellion. Les troupes de Kabila ont par ailleurs affirmé que leur marche sur Kinshasa était « inéluctable ».
mardi 13 mai
Les rebelles ont une fois de plus claironné leur entrée imminente à Kinshasa. Cette fois, pourtant, le gouvernement ne s'est pas contenté de démentir : il a appelé la population de la capitale à se défendre. A l'issue d'une réunion du Conseil de sécurité, le ministre de l'Information a annoncé que le couvre-feu était instauré dans la capitale de vingt heures du soir à six heures du matin. Il a précisé que l'armée surveillait les endroits stratégiques de la ville et qu'elle avait reçu « l'ordre d'ouvrir le feu après trois tirs de sommation sur toute personne prise en flagrant délit de pillage ». L'Afrique du Sud a multiplié ses efforts diplomatiques pour atténuer les derniers points d'achoppement entre les deux parties et ouvrir la voie à une solution qui ne soit pas exclusivement militaire.
du mardi 13 au samedi 17 mai
La ville de Mbandaka est le théâtre du massacre de nombreuses personnes, principalement hutues.
mercredi 14 mai
Laurent-Désiré Kabila et le président Mobutu ne se sont pas rencontrés, comme prévu, dans le port congolais de Pointe-Noire (sur le navire sud-africain Outeniqua), car le chef rebelle n'est pas venu... La rencontre a finalement été annulée. Kabila était parti de son côté pour l'enclave angolaise de Cabinda où, à son tour... il attendait. Les présidents sud-africain (Nelson Mandela) et congolais (Pascal Lissouba) ont aussi attendus pour rien. Kabila s'est entretenu dans la capitale angolaise avec le président angolais José Eduardo dos Santos.
jeudi 15 mai
Après son entretien avec le président sud-africain, Nelson Mandela, dans la soirée au Cap, le chef de la rébellion zaïroise a donné quatre jours au président Mobutu pour examiner les propositions sud-africaines de passation pacifique du pouvoir.
vendredi 16 mai
A l'aube, le président Mobutu a quitté Kinshasa pour Gbadolite, sa luxueuse résidence de la jungle à 1 200 kilomètres au nord de la capitale. Ce départ a rapidement pris le sens d'un premier pas vers l'exil. Dans l'après-midi, un communiqué du Conseil des ministres informait le pays que « pour ne pas apparaitre comme un obstacle à une solution négociée et à l'ordre constitutionnel, le Président a décidé de se tenir à l'écart ». Le ministre de l'Information expliquait de son côté : « Le Président a cessé toute intervention dans la conduite des affaires de l'Etat et ne se présentera pas aux prochaines élections. Il règne mais ne gouverne pas et il conserve son titre de Président ». Alors que les rebelles sont parvenus à quelques kilomètres de la capitale, les généraux zaïrois auraient d'ailleurs manifesté leur intention de ne pas s'opposer à l'avancée des forces de Kabila. L'Alliance rebelle exigeait d'ailleurs dans la soirée « la reddition inconditionnelle de l'armée zaïroise ».
nuit du vendredi 16 au samedi 17 mai
Le ministre de la Défense zaïroise, le général Mahele, a été tué par des membres de la garde présidentielle, lors d'une visite à la caserne de la garde. Mahele leur demandait de ne pas résister à l'avance des rebelles.
samedi 17 mai
Les rebelles ont commencé l'attaque de Kinshasa : ils se sont emparés de l'aéroport international de Ndjili et du Parlement.
dimanche 18 mai
Après une nuit de violences sporadiques au cours de laquelle au moins vingt-six personnes ont été tuées, Kinshasa a retrouvé un calme relatif. A l’issue de huit mois de rébellion, la capitale zaïroise est désormais totalement contrôlée par les rebelles, après la prise du camp militaire de Tshatshi, forteresse protégeant le palais somptuaire de Mobutu. Les derniers hommes résistants de la DPS ont rendu leurs armes. Au moins deux cents personnes, majoritairement des militaires, ont été tuées depuis la veille et cinquante-deux civils blessés. La plupart des morts ont été dénombrés autour de l'aéroport international. Pour les soldats fidèles à Mobutu qui sont restés dans la ville plutôt que de prendre la fuite, l'avenir est plus qu'incertain comme le laisse présager des exécutions sommaires qui viennent d'avoir lieu. Au camp Mobutu, les militaires en ligne ont remis leurs armes aux hommes de Kabila. Un homme, poussé en avant par la foule, a été violemment interrogé et exécuté. La radio de Kinshasa, contrôlée par l'Alliance a appelé dans la soirée la population à se constituer en « groupes de défense » avant le contrôle total de la ville. Kabila se trouve toujours à Lubumbashi. L'Afrique du Sud l'a reconnu comme président de la République démocratique du Congo (Zaïre). Kabila a promis de former un gouvernement de salut national d'ici au 20 mai, d'installer dans les deux mois une assemblée constituante et d'organiser des élections d'ici à deux ans. Dans l'intervalle, le gouvernement de transition sera ouvert aux hommes politiques d'opposition - à l'exclusion de ceux qui ont soutenu le régime de Mobutu - mais à titre individuel, sans participation des 450 partis politiques. L'ex-président Mobutu a quitté Lomé (Togo) pour une nouvelle destination (Maroc ?).
mardi 20 mai
Laurent-Désiré Kabila est arrivé dans la soirée à Kinshasa. Il a attendu logiquement que la sécurité soit pleinement assurée dans les rues de la capitale, où circulent encore des soldats de l'ancien régime. L'Alliance a d'ailleurs annoncé l'arrivée prochaine de 10 000 à 20 000 hommes chargés de sécuriser la ville et ses environs. Deux hommes d'affaires français ont été assassinés par des hommes en uniforme dans une usine de la périphérie de la ville. Les nouvelles autorités de la république démocratique du Congo ébauchent leur programme. L'organisation humanitaire « Médecins sans frontières » estime à 190 000 le nombre de réfugiés hutus portés disparus dans l'est du Zaïre. Dans un rapport de dix pages, MSF affirme que l'Alliance rebelle a mis en place « une stratégie délibérée visant à l'élimination de tous les réfugiés rwandais, y compris des femmes et des enfants ». Dans le sud du Zaïre, près de la frontière angolaise, les réfugiés seraient systématiquement persécutés par les hommes de Kabila.
jeudi 22 mai
Les tractations pour la formation du gouvernement se sont prolongées à Kinshasa. Les tractations sur le rôle à réserver au chef de l'opposition au régime de Mobutu, Etienne Tshisekedi, ont retardé l'annonce de ce gouvernement. A l'étranger, la position de Kabila est confortée. Il a notamment reçu le soutien du secrétaire général de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) Salim Ahmed Salim.
nuit du jeudi 22 au vendredi 23 mai
Kabila veut exercer le pouvoir, seul. Six jours après s'être proclamé « président » de la République démocratique du Congo (ex-Zaïre), il a formé un gouvernement qui confirme sa mainmise sur le pays. Kinshasa a un nouveau gouvernement... sans Premier ministre. Etienne Tshisekedi, opposant de longue date à l'ancien président Mobutu, était pourtant considéré comme le titulaire logique de ce poste. Ce cabinet ne comporte pas non plus de titulaire pour la Défense. « Il s'agit d'un système présidentiel », a expliqué le nouveau ministre de l'Information Raphaël Genda. Sur les treize membres du gouvernement, seulement quatre responsables de l'opposition radicale ont été intégrés. L'équipe compte également deux ministres issus du Front démocratique (Santé, Poste et Télécommunications), qui ont dû toutefois rejoindre l'Alliance. Finalement, le pays se replonge dans un système de parti unique après sept années de multipartisme.
vendredi 23 mai
La nomination du nouveau gouvernement ne plait pas aux Kinois : « Nous n'accepterons jamais que Tshisekedi, qui a combattu la dictature pendant plus de vingt ans, soit combattu par Kabila et ses Rwandais ». Si la majorité des Kinois accepte que Kabila soit le chef de l'Etat, elle exige par contre que le Congo-Zaïre ne soit géré et gouverné que par les Zaïrois. Les Kinois s'interrogent et menacent de recourir aux armes pour faire partir les Rwandais : « Les forces armées zaïroises ne sont pas mortes. Elles sont plus puissantes que les Tutsis ; nous allons les chasser bientôt ». Loin des querelles de pouvoir de l'ex-Zaïre, le président déchu Mobutu a quitté Lomé (Togo) pour Rabat (Maroc), où il est arrivé en début d'après-midi accompagné de cinquante-six membres de son entourage.
dimanche 25 mai
« Il y aura des élections démocratiques après la période de transition de deux ans », a annoncé Laurent-Désiré Kabila. Face à la grogne qui s'instaure dans les rangs de l'opposition radicale, le ministre des Affaires étrangères, Bizima Karaha, a expliqué que, compte tenu de l'état dans lequel se trouve le pays, il fallait prendre le temps de créer les « conditions minimums » à l'organisation d'élections « démocratiques et libres. Nous ne voulons pas de pseudo-élections ». L'AFDL a promis la convocation d'une Assemblée constituante dans les soixante jours, en faisant appel, en priorité, aux paysans, puis aux intellectuels. Les soldats de Kabila se sont surtout distingués dans la matinée par des perquisitions dans le grand hôtel Intercontinental de Kinshasa, où logent de nombreux journalistes et diplomates. Ils disaient « rechercher des armes ». Ce qui a été mal perçu, d'autant que le personnel chargé de mener les perquisitions s'est montré brutal. Signe de détente, l'aéroport international doit être rouvert le 26 mai au trafic civil. En revanche, le port de Kinshasa reste fermé. La France et la nouvelle République démocratique du Congo ont eu leur premier contact officiel à Kinshasa. L'ambassadeur de France et un envoyé spécial du Quai d'Orsay ont été reçus par le ministre des Affaires étrangères de l'Etat qui a succédé au Zaïre sur l'échiquier international, Bizima Kahara. L'ambassadeur de France a, par ailleurs, sollicité une audience auprès de Kabila.
lundi 26 mai
Même ceux qui avaient accueilli les rebelles de Kabila à bras ouvert dans Kinshasa sont gagnés par le doute. Dans la soirée, bien que les partis eux-mêmes ne soient pas encore hors-la-loi, le nouveau pouvoir de l'ex-Zaïre a interdit toute « activité politique » dans la capitale. La colère gronde et pourrait rapidement dégénérer. Les manifestations ont été interdites (celle du 28 mai est malgré tout maintenue par ses organisateurs).
mercredi 28 mai
Les soldats de Kabila ont brutalement mis fin à la marche de quelque 2 000 partisans, à Kinshasa. Après une marche pacifique de deux heures réclamant « la démission immédiate et sans condition de Kabila », les soldats ont surgi de trois camions militaires. Leur seule présence a suffi à disloquer le cortège. Puis les troupes ont poursuivi dans les ruelles alentour les jeunes manifestants en les frappant à coups de bâton et avec des branchages. Plusieurs dizaines d'entre eux ont été embarqués vers le camp militaire de Kokolo. Une seule rafale a été tirée en l'air, semant la panique. Des dizaines de journalistes, photographes et caméramans ont été fouillés. Leurs cassettes et films ont été confisqués. L'UDPS de Tshisekedi a dénoncé la « brutalité de réaction » des soldats qui, selon elle, « montre le désarroi » des nouvelles autorités. Kabila a signé un décret-loi en quinze articles octroyant les pleins pouvoirs au président autoproclamé.
jeudi 29 mai
Kabila a prêté serment de « fidélité à la nation » (et à sa propre loi) dans le grand stade de Kinshasa. Le nouveau président dispose de tous les pouvoirs jusqu'en avril 1999, date à laquelle devrait avoir lieu, comme il l'a annoncé, les élections législatives. Plus de 50 000 personnes s'étaient rassemblées dans le stade sous des banderoles saluant le « libérateur ». Pourtant, quelques centaines d'opposants, n'ont pas craint de descendre la pelouse, juste avant la cérémonie officielle, pour manifester leur désapprobation. Les soldats en armes ne sont pas intervenus. La prestation de serment a été reçue par le président de la Cour suprême de l'époque Mobutu, qui n'a pas été dissoute, en présence du procureur général de la République et de vingt-deux juges. Assistaient également à la cérémonie, outre de nombreux ambassadeurs, les présidents angolais, rwandais, ougandais et zambiens. Autant de chefs d'Etat qui ont fortement soutenu l'ancien maquisard dans sa guerre contre Mobutu. Une des premières mesures du nouveau chef de l'Etat a été d'interdire l'usage du téléphone cellulaire aux fonctionnaires. Ils ont quarante-huit heures pour rendre cet équipement aux nouvelles autorités sous peine de sanctions.
vendredi 30 mai
Des opposants se sont manifestés dans les rues de Kinshasa. Ils étaient environ 150, groupés derrière une banderole sur laquelle on pouvait lire : « Tshisekedi est notre homme ». Leur cortège, parti de la gare centrale, a rallié le centre-ville. Ils se sont ensuite dispersés devant le domicile d'Etienne Tshisekedi, dans la banlieue de la capitale.
dimanche 1er juin
L'ambassadeur de France à Kinshasa, Michel Rougagnou, a finalement été reçu dans la matinée par Kabila. Cette audience avait été sollicitée, à la demande de Paris, une semaine plus tôt. Le nouvel homme fort de l'ex-Zaïre a affirmé qu'il attendait « beaucoup de la France » dans son projet de reconstruction du pays.
mercredi 4 juin
Lors du 33e sommet de l'OUA, qui s'est achevé au Zimbabwe, Kabila a donné son accord pour une enquête internationale sur les massacres de réfugiés hutus rwandais dans l'est du pays. Selon le secrétaire général de l'ONU, le tombeur de Mobutu a accepté de « coopérer à la fois sur l'aide aux réfugiés sur les accusations de massacre ». Kabila devrait désigner un membre de son gouvernement pour « travailler avec le HCR afin de déterminer l'ampleur du problème et agir énergiquement pour résoudre la question des réfugiés ». Kabila a accepté le retour de la commission d'enquête, mais à une condition expresse : que le Chilien Roberto Garreton n'en soit pas. Ce représentant de l'ONU avait dénoncé, au début de l'année, les massacres perpétrés dans l'est du pays.
samedi 7 ou dimanche 8 juin
Un avion de la compagnie Bazaïr s'est écrasé dans l'est du pays, faisant trente morts, les vingt-sept passagers et les trois membres d'équipage.
mardi 10 juin
Il existe de fortes présomptions que des « atrocités » continuent dans l'est de l'ex-Zaïre, a affirmé à Genève (Suisse) Brian Atwood, l'un des responsables de l'USAid, organisation humanitaire américaine, lors d'une réunion sur le sujet.
vendredi 13 juin
Selon un rapport émanant de l'Association de défense des droits de l'homme de l'ex-Zaïre (Azadho), 647 personnes au moins ont été assassinées et enterrées dans des fosses communes, à Kinshasa et dans les environs, entre le 19 et le 28 mai, c'est-à-dire après la chute de la capitale zaïroise. Les victimes sont « pour la plupart des ex-FAZ, des pillards et des innocents ». Les responsables de ces massacres sont les soldats de l'ADFL. L'Association dénonce l'indifférence des autorités à ce recours « spontané, presque naturel, à la justice au bout du fusil ».
mercredi 18 juin
Au Maroc, venant de Rabat, où il séjournait depuis sa fuite de Kinshasa, l'ancien président zaïrois Mobutu Sese Seko, soixante-six ans, est arrivé dans la soirée à Tanger. L'ex-homme fort du Zaïre, qui souffre d'un cancer de la prostate va suivre une chimiothérapie à l'hôpital Mohammed V de cette ville.
samedi 21 juin
Dans un discours prononcé ces jours derniers à Kindu et diffusé ce jour à la télévision, Kabila a révélé que de nombreux dignitaires mobutistes avaient été arrêtés et il s'est plaint de l'attitude des grandes puissances qui pressent Kinshasa de les réinstaller à leurs postes de commande. Commentaire de Kabila : « elles perdent leurs temps ». Parmi les personnes arrêtées : le président-administrateur délégué de la toute puissante société minière de Bakwanga, chargée de l'exploitation des diamants à Mbuji-Mayi, le gouverneur de la Banque nationale, son adjoint et quelques généraux.
du samedi 21 au dimanche 22 juin
Des troupes de Kabila ont été envoyées dans le nord-est du pays pour y combattre des maquisards hutus qui ont lancé, depuis cette zone, une attaque surprise en territoire ougandais. Le ministère ougandais de la Défense explique qu'il n'est pas au courant du mouvement des troupes ex-Zaïroises mais qu'il ne refusera pas leur soutien.
lundi 23 juin
La guerre civile qui fait rage au Brazzaville voisin a touché la capitale zaïroise, de l'autre côté du fleuve. Six obus sont tombés à Kinshasa, sur le camp militaire de Tshatshi.
jeudi 26 juin
Le dirigeant de l'opposition Etienne Tshisekedi a été arrêté à son domicile (avec sa femme et trois de ses enfants), dans la soirée, par une cinquantaine de soldats. Cette interpellation, effectuée peu après un discours aux étudiants de la capitale, a donné lieu à de nombreux incidents dans Kinshasa. Le leader de l'opposition s'est vu inviter, par les militaires qui ont conduit son « interrogatoire », à abandonner son action politique.
vendredi 27 juin
Etienne Tshisekedi a été libéré dans la matinée. Il a lancé un appel à la lutte contre Kabila. « J'appelle tous les partisans à combattre toutes les formes de dictatures », a-t-il notamment lancé. En signe de protestation contre cette arrestation, des opposants au nouveau régime ont brûlé dans la matinée trois camions et deux voitures dans le centre de la capitale et pillé au moins une station d'essence. Plusieurs rues ont été bloquées par des voitures enflammées. La police a du tirer pour disperser les manifestants. Il y aurait eu un blessé grave. Dans l'est du pays, les témoignages se multiplient sur les massacres de réfugiés hutus commis ces derniers mois par des soldats rwandais. Au Maroc, le maréchal Mobutu a été hospitalisé d'urgence à Rabat.
samedi 28 juin
Mobutu a subi une opération chirurgicale à Rabat.
jeudi 3 juillet
La mission d'enquête des Nations unies sur les massacres de réfugiés dans l'ex-Zaïre n'arrivera pas à Kinshasa le 7 juillet, comme prévu. Le gouvernement de la nouvelle République démocratique du Congo exige « l'identification » des enquêteurs et conteste les modalités de la mission. Kinshasa veut que les investigations couvrent la période allant de 1993 à mai 1997 pour prendre en compte les massacres des Tutsis par les réfugiés hutus rwandais et pas seulement les massacres de ces derniers par les forces liées, de près ou de loin, au nouveau régime.
mardi 8 juillet
Jacques Matanda-ma-Mboyo, responsable de la « branche armée de l'opposition radicale » de l'ex-Zaïre, a appelé, à Paris, à la constitution d'un « Front populaire de résistance armée » au régime de Kabila en République démocratique du Congo. Il s'est dit « ouvert à toutes les alliances dans la perspective de l'établissement d'un Etat de droit et pour l'éradication des milices et armées génocidaires tutsies qui occupent le pays ». Il avoue toutefois être éloigné du chef de l'opposition radicale, Etienne Tshisekedi, par « une divergence fondamentale sur les moyens de lutte » contre le pouvoir en place à Kinshasa.
samedi 12 juillet
La justice belge tente de bloquer l'ensemble des avoirs de l'ex-président Mobutu. Sa fille aînée a même été brièvement interpellée. Elle s'est vue contrainte de remettre plusieurs chèques d'un montant total de 27,75 millions de dollars, fruit de la vente du château Fond'Roy.
mercredi 16 juillet
Arrestation du directeur du journal La Référence Plus après un article mettant en doute l'avenir politique du président Kabila.
jeudi 17 juillet
Le secrétaire d'Etat adjoint Thomas Pickering a indiqué que l'aide américaine à la République démocratique du Congo « dépendra en grande partie » des réformes démocratiques, du respect des droits de l'homme, de la coopération avec les organisations humanitaires (allusion aux réfugiés rwandais hutus) et à l'instauration d'une économie de libre-échange. Malgré les réserves à l'égard de Kabila, les Etats-Unis sont prêts à débloquer un premier programme de soixante millions de francs.
vendredi 25 juillet
Kabila, qui a interdit les activités politiques dans l'ex-Zaïre depuis juin, n'y va pas de main morte : ses forces antiémeutes ont violemment dispersé, en ouvrant le feu, deux manifestations pacifiques, l'une au centre de Kinshasa, l'autre en périphérie, à Bandalungwa. Une dizaine de personnes ont été arrêtées. Une manifestante, qui portait une banderole réclamant le rétablissement des activités politiques, a été battue sans ménagement.
samedi 26 juillet
Kabila a expliqué que « les organisateurs de ces manifestations portent la responsabilité de ceux qui sont tombés sous le feu ». Il a demandé aux leaders de l'opposition de venir le voir pour lui exposer leurs revendications plutôt que d'être responsables de « troubles publics ». Les manifestations sont illégales pendant toute la période de « transition politique » du pays.
dimanche 27 juillet
Une trentaine de membres de l'entourage de l'ex-dictateur zaïrois Mobutu ont été priés par les autorités marocaines de quitter le pays dans les dix jours. Il ne s'agit pas de membres de sa famille, mais de gardes du corps ou d'anciens officiers de la sécurité.
jeudi 31 juillet
Le gouvernement de Kinshasa juge encore « prématurée » la venue au Congo-Zaïre de l'envoyé spécial de l'ONU dans ce pays, le Britannique Robin Kinloch, ainsi que celle d'une mission chargée de coordonner les efforts de développement. La cause : les Nations unies veulent depuis plusieurs semaines envoyer sur place une mission d'enquête sur les massacres de réfugiés rwandais dans l'est de l'ancien Zaïre.
dimanche 3 août
Le Togolais Atsu Koffi Amega (soixante-cinq ans), ancien président de la Cour suprême de justice du Togo, a été nommé à la tête de la mission d'enquête de l'ONU sur les massacres dans l'ex-Zaïre. Il sera assisté du procureur général adjoint du Zimbabwe, Andrew Chigorera, et d'une troisième personne encore à nommer. La mission devra rendre son rapport en décembre. Laurent Kabila avait refusé la nomination du Chilien Roberto Garreton, membre de la Commission des droits de l'homme de l'ONU, à la tête de cette mission.
mardi 5 août
Après deux jours de visite à Kinshasa, les ministres des Affaires étrangères de la troïka européenne (Luxembourg, Pays-Bas, Grande-Bretagne) vont recommander au prochain conseil des ministres de l'Union européenne la « reprise de la coopération structurelle » avec l'ex-zaïre. Il s'agit ainsi d'« assister » Laurent Kabila (en visite en Angola) dans son « programme de réformes démocratiques et de reconstruction nationale ».
du jeudi 14 au vendredi 15 août
Débarquant de pirogues bondées avec leurs matelas sur la tête, des centaines de Congolais, fuyant les affrontements à Brazzaville (Congo), arrivent à Kinshasa, de l'autre côté du fleuve.
samedi 16 août
Laurent-Désiré Kabila, le président du Congo-Kinshasa (ex-Zaïre), tente de s'imposer comme médiateur dans le conflit qui déchire son voisin du Congo-Brazzaville. Il a reçu Pascal Lissouba auquel il a transmis de mystérieuses « propositions de paix ». De leur côté, les partisans de Sassou-N'guesso ont déjà qualifié l'initiative de Kabila de « cafouillis ». Ils accusent Lissouba de faire diversion et Kabila de saboter la médiation déjà menée par le président gabonais Bongo. A Brazzaville, de violents combats à l'arme lourde ont encore eu lieu. Depuis trois jours, quelque 8 500 Congolais ont traversé le fleuve pour se réfugier à Kinshasa.
lundi 18 août
Fatigué de ce qu'il appelle « les atermoiements du Conseil de sécurité » de l'ONU, Kabila propose l'envoi dans un « bref délai » d'une force africaine à Brazzaville, pour s'interposer entre les soldats du président Lissouba et les miliciens de Sassou N'guesso. Le premier a déjà accepté. Le second n'a pas encore réagi, mais on sait que ses partisans n'apprécient guère l'interventionnisme de Kinshasa. D'autant que la force d'interposition serait composée de soldats des pays qui ont porté Kabila au pouvoir (Ouganda, Angola, Rwanda, Burundi, etc.).
mercredi 20 août
L'enquête sur les massacres de réfugiés, notamment de Hutus rwandais, dans l'ex-Zaïre, va enfin démarrer. La délégation des Nations unies, conduite par le Togolais Atsu-Kofi Amega, est attendue le 23 août à Kinshasa. L'un des membres de la mission a déjà fait part de ses inquiétudes quant à la possibilité de travailler librement.
nuit du jeudi 21 au vendredi 22 août
Au moins 120 Tutsis ont été tués au Rwanda à la machette ou au fusil par des inconnus, dans le camp de réfugiés de Mudende, près de Gisenyi. Le massacre s'est déroulé vers 1 h 30. Originaires de l'est de l'ex-Zaïre, les victimes avaient fui leur pays et les combats qui y opposaient Hutus et Tutsis, en 1995 et 1996. Le gouvernement rwandais accuse des groupes armés hutus d'être responsables du massacre.
dimanche 24 août
La mission d'enquête de l'ONU sur les massacres dans l'est de l'ex-Zaïre est arrivée à Kinshasa.
jeudi 28 août
Le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, a rejeté les « nouvelles conditions » posées par le président Kabila pour la poursuite d'une mission des Nations unies, pour enquêter sur des massacres présumés dans l'ex-Zaïre. Il a demandé à son émissaire, Mohamed Sahnoun, de se rendre immédiatement sur place.
samedi 30 août
Le gouvernement récuse le chef de la mission d'enquête sur les massacres présumés de Hutus dans l'est de l'ex-Zaïre, le Togolais Atsu Kaffi Amega, et refusé d'accorder les visas aux six officiers des Nations unies qui devraient assurer la sécurité des membres de la délégation. Pour soutenir le gouvernement, près de 5 000 personnes ont organisé une marche de soutien et déposé des lettres de protestation auprès des ambassades des Etats-Unis, de la Belgique et de la France qu'elles accusent de manipuler les Nations unies afin de salir l'image du nouveau régime « avec cette histoire de prétendus réfugiés hutus massacrés par les hommes de Kabila ».
vendredi 5 septembre
Plus de 2 000 personnes ont été tuées depuis juillet dans l'est de l'ex-Zaïre lors d'affrontements entre militaires et combattants maï-maï issus de différents groupes ethniques, a annoncé à Kinshasa, l'Association de défense des droits de l'homme (AZADHO). Les affrontements, qui ont fait 2 162 morts, ont eu lieu dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, frontalières de l'Ouganda, du Rwanda et du Burundi. La nomination à la tête des administrations locales de personnalités d'ethnie tutsie a servi de détonateur à cette flambée de violences.
dimanche 7 septembre
Mobutu Sese Seko, soixante-six ans, est mort dans la soirée à l'hôpital militaire de Rabat (Maroc), des suites d'un cancer de la prostate. Le gouvernement de Kinshasa ne semble pas opposé au fait que l'ancien président zaïrois soit inhumé chez lui, dans le nord de l'ex-Zaïre.
lundi 8 septembre
La République démocratique du Congo (ex-Zaïre) devient le treizième Etat membre de la Communauté de développement de l’Afrique Australe (CDAA ; en anglais Southern African Development Community, SADC).
mercredi 10 septembre
Les services de sécurité congolais ont arrêté à Kisangani un ressortissant français, Jean-Marie Bergesion, installé de longue date dans l'est de l'ex-Zaïre. La raison de cette arrestation, qui intervient en même temps que celle d'un Belge, n'a pas été révélée.
jeudi 11 septembre
Le HCR a décidé de suspendre son aide aux Rwandais présents dans l'ex-Zaïre, en raison de l'absence de garanties de sécurité. Une décision qui aurait, dit-on, soulagé Kabila, l'homme qui renversa Mobutu...
mardi 16 septembre
Le gouvernement de la République démocratique du Congo a interdit à la commission d'enquête des Nations unies de se rendre dans la région de MBandaka, dans le nord-ouest, où des violations graves des droits de l'homme lui ont été signalées. Elle était chargée d'y vérifier des massacres présumés de réfugiés rwandais.
mercredi 17 septembre
La ville de Masisi, au nord-ouest de Goma, a été ravagée, il y a un mois, par une attaque massive. Les autorités annoncent quarante-huit morts, mais des témoins parlent de centaines de victimes. Les habitations du centre-ville ont été brûlées et certains bâtiments publics, dont l'hôpital et l'école, endommagés, selon des employés d'organisations humanitaires. Le massacre aurait été commis par des troupes tutsies congolaises ou rwandaises, présentes dans la région depuis le début de la rébellion de Kabila, il y a un an. Il s'agirait de représailles après l'agression de soldats tutsis, quelques jours auparavant, par des combattants « Maï-Maï », des anciens alliés de Kabila.
jeudi 25 septembre
Un membre de la garde du ministre de la Santé a ouvert le feu contre un groupe d'écoliers qui manifestaient devant la résidence du ministre, tuant deux de ceux-ci. Il a été immédiatement jugé par un tribunal militaire qui l'a condamné à mort.
A Kinshasa, la chambre de commerce franco-congolaise a été mise sous scellés par la Cour suprême de Justice de la nouvelle République démocratique du Congo qui revendique le bâtiment. La chambre de commerce franco-zaïroise s'y était installée en 1993, après avoir supporté les frais de réhabilitation de l'édifice : 3,2 millions de francs, pris en charge par le ministère français de la Coopération et la chambre de commerce et d'industrie de Paris.
A Ouagadougou, la salle des congrès de l’UEMOA accueille le tirage au sort de la 21e Coupe d’Afrique des Nations de football, qui sera organisée par le Burkina-Faso du 7 au 28 février 1998. Le groupe B comprend le Ghana, la République démocratique du Congo, le Togo et la Tunisie.
lundi 29 septembre
Des obus tirés de Brazzaville sont tombés sur une caserne de Kinshasa, de l'autre côté du fleuve Congo, faisant 17 victimes. Les factions congolaises rivales se sont mutuellement rejetées la responsabilité de ces dérapages.
mercredi 1er octobre
Laurent-Désiré Kabila, le président de l'ex-Zaïre, et Pascal Lissouba, président du Congo, ont décidé de déployer à Brazzaville des soldats de l'ex-Zaïre pour mettre fins aux tirs d'obus de Brazzaville vers Kinshasa. Ces tirs ont tué officiellement vingt-et-une personnes à Kinshasa depuis trois jours.
jeudi 2 octobre
Kofi Annan, secrétaire général de l'ONU rappelle à New York les trois enquêteurs sur les massacres de réfugiés dans l'ex-Zaïre, qui se trouvent actuellement à Kinshasa. Leur travail est régulièrement bloqué par les autorités congolaises. Kofi Annan aurait donné deux semaines à Kabila pour clarifier sa position. Un membre de l'organisation américain Human rights watch, Scott Campbell, qui vient d'effectuer une visite de quatre semaines dans l'ex-Zaïre, affirme de son côté que le nouveau régime est en train de détruire à grande vitesse les preuves de massacres. Par ailleurs, comme prévu, un détachement d'observateurs militaires de l'ex-Zaïre a débarqué à Brazzaville. Il est chargé de « créer un corridor de sécurité » entre les deux capitales. Ce détachement pourrait se transformer en « composante de la force africaine d'interposition », a précisé le Premier ministre congolais Bernard Kolélas. Pour leur part, les adversaires du président Lissouba, les amis de l'ancien président congolais Sassou N'guesso, dénoncent ce déploiement des ex-Zaïrois, qui constitue, disent-ils, une « implication directe de la RDC dans le conflit au Congo-Brazzaville ». D'où une pression grandissante de la France sur Sassou N'guesso pour qu'il accepte le cessez-le-feu élaboré par le comité de médiation dirigé par le président gabonais Omar Bongo.
vendredi 3 octobre
Kinshasa a décidé, dans la soirée, d'expulser toutes les organisations humanitaires de la région de Goma, dans l'est du pays, et de fermer sa frontière avec le Rwanda.
mercredi 8 octobre
La Fédération internationale des droits de l'homme et l'observatoire Human Right Watch affirment détenir « la preuve matérielle irréfutable » de massacres commis dans l'ex-Zaïre par les troupes de Kabila et leurs alliés. Des témoins oculaires accusent notamment des militaires rwandais. Les deux organisations ont remis leurs preuves à l'ONU. Par ailleurs, de violents combats ont éclaté, dans la matinée, autour de l'aéroport de Gisenyi (nord-ouest du Rwanda) entre l'armée patriotique rwandaise et les milices hutues « interhamwe ». Selon diverses sources occidentales, les autorités de l'ex-Zaïre auraient réquisitionné des véhicules à Goma, de l'autre côté de la frontière, une « forte présence militaire » étant signalée sur la route qui va du centre de la ville à l'aéroport.
jeudi 9 octobre
Les Américains connaissaient les plans du Rwanda pour attaquer des camps de réfugiés hutus dans l'est de l'ex-Zaïre, lors de l'offensive de Kabila. C'est ce qu'affirment Human Right Watch et la Fédération internationale des droits de l'homme. Elles détiennent la « preuve irréfutable » de massacres commis par les soldats de Kabila et ses alliés rwandais, soutenus par les Etats-Unis.
samedi 25 octobre
Kabila a fini par céder aux pressions internationales : après des semaines de tergiversations, il autorise une mission de l'ONU à enquêter sur les massacres de réfugiés rwandais. Un accord signé, grâce à l'intervention directe des Etats-Unis, permet à cette mission d'intervenir « librement dans différentes zones » de son choix. Quelques heures plus tard, cependant, Kabila a menacé de « ne pas coopérer avec la mission » si la communauté internationale continue d'insister pour « lier son aide à cette enquête ».
mardi 11 novembre
La mission d'enquête des Nations unies sur les accusations de massacres de réfugiés rwandais dans l'ex-Zaïre est attendue dans la soirée à Kinshasa. Elle doit reprendre le contact avec le régime de Kabila. Soumis à une forte pression internationale, le gouvernement de la République démocratique du Congo s'est engagé, enfin, à garantir la liberté de mouvement des enquêteurs.
dimanche 16 novembre
Les médias officiels de l'ex-Zaïre ont annoncé le retrait de la République démocratique du Congo de la francophonie (alors que le sommet de la francophonie se tient au Vietnam) et le ministre de l'Information a confirmé cette décision.
mardi 18 novembre
La mission de l'ONU d'enquête sur les massacres dans l'est du pays attend toujours d'être autorisée à travailler. Après avoir essuyé de nombreux contretemps au fil des semaines, elle avait enfin obtenu une rencontre avec le gouvernement pour décider de l'organisation de l'enquête et du départ de ses membres sur le terrain, mais l'entrevue a finalement été reportée et les autorités congolaises n'ont pas fixé de nouvelle date.
mercredi 19 novembre
Kabila a semé la confusion en affirmant, lors d'une conférence de presse, que son pays « n'a pas quitté la francophonie jusqu'à maintenant », ajoutant : « Je pense que la France est une amie du Congo parce que le Congo n'a jamais fait de mal à la France ». Il aurait fini par céder aux réticences des milieux intellectuels, inquiets d'une rupture de la coopération avec la Francophonie.
nuit du jeudi 27 au vendredi 28 novembre
Des tirs ont retenti dans Kinshasa.
vendredi 28 novembre
Des fusillades nourries entre militaires ont fait au moins onze morts dans le quartier de la présidence, à Kinshasa. Deux civils figurent parmi les victimes. Ces incidents confirment les rivalités et le climat de nervosité au sein des forces de sécurité, partagées en « Katangais », venus du sud du pays, et « Rwandais », généralement des Tutsis originaires de la zone frontalière du Kivu.
samedi 29 novembre
Le premier conseiller de l'ambassade de France à Kinshasa a été déclaré indésirable par les autorités, qui l'ont expulsé. Plusieurs journaux proches du pouvoir ont accusé Eric Lubin d'être un « espion », entretenant des relations avec les chefs de l'ancienne armée de Mobutu pour « renverser » Kabila.
lundi 1er décembre
La France a demandé au premier conseiller de l'ambassade de l'ex-Zaïre à Paris de faire ses valises avant la fin de la semaine. Le gouvernement de Kabila soupçonne la France de vouloir « déstabiliser » le régime. Paris estime qu'une « normalisation des relations entre les deux pays passe par la possibilité, pour les émissaires de l'ONU, de mener sans entraves leur enquête sur les massacres de civils lors de la prise du pouvoir par les troupes de Kabila ».
jeudi 4 décembre
La Commission européenne a débloqué une aide globale de 566 millions de francs pour la République démocratique du Congo. Il s'agit d'un premier pas vers la reprise complète de l'aide de l'Union européenne qui avait été interrompue en 1992, du temps du régime de Mobutu.
vendredi 5 décembre
La conférence des « amis du Congo », qui a réuni vingt-six pays et organisations internationales à Bruxelles, a décidé de créer un fonds de soutien financier à la remise en marche de la République démocratique du Congo. Le gouvernement de Kabila s'est engagé, lui, à respecter les droits de l'homme et à construire « une démocratie basée sur des élections libres et équitables ».
lundi 8 décembre
La mission d'enquête des Nations unies sur les accusations de massacres en République démocratique du Congo (ex-Zaïre) a enfin été autorisée à se rendre dans le nord-ouest du pays. Elle a quitté Kinshasa pour se rendre à Mbandaka, où elle doit commencer ses investigations.
mercredi 10 décembre
Les rebelles hutus rwandais (Interhamwe et FAR), qui avaient déjà attaqué le camp de réfugiés zaïrois (17 000 Tutsis de Masisi, au nord-est de l'ex-Zaïre, de Mudende, au Rwanda, en août, y sont revenus dans la soirée. Le massacre, qui constitue un défi au gouvernement de Kigali, a fait 271 morts officiellement (plus de 1 000 selon plusieurs autres témoignages) et autant de blessés. Les assaillants venaient de la ville de Kanama et de la frontière de l'ex-Zaïre. Les rebelles demandent aux Tutsis de quitter « toutes les villes du Rwanda, avant qu'il ne soit trop tard... »
jeudi 11 décembre
La radio de Kinshasa a émis un communiqué du gouvernement de l'ex-Zaïre parlant de « l'agression » menée par « une bande armée, à partir du Rwanda, contre Bukavu, dans l'est du pays. Selon ce même communiqué, les troupes congolaises ont « administré une riposte vigoureuse à cette bande qui a battu en retraite ». Aucun bilan n'a été diffusé.
vendredi 12 décembre
Madeleine Albright, le secrétaire d'Etat américain, a promis une aide de trente-cinq à quarante millions de dollars (210 à 240 millions de francs) pour la reconstruction et la démocratisation de l'ex-Zaïre. Lors d'une conférence de presse conjointe avec le président Kabila, elle a cependant précisé que cette aide serait soumise à l'approbation du Congrès américain, qui « s'intéresse de près à la manière dont le président Kabila respecte ses obligations en matière des droits de l'homme et de démocratie ».
mardi 16 décembre
Les inspecteurs de l'ONU chargés d'enquêter sur les massacres de réfugiés hutus rwandais, qui avaient pu commencer leurs investigations à Mbandaka (nord-ouest) ont du quitter la ville pour regagner Kinshasa, en raison de l'hostilité de la population. L'ONU ignore si l'équipe pourra un jour reprendre son travail.
samedi 27 décembre
L'organisation non-gouvernementale belge Memisa a fait état de dizaines de morts dans l'est du Congo où 20 000 personnes fuient une crue du fleuve Congo. Les médecins craignent une épidémie de dysenterie et de choléra.